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Enquête de la gendarmerie d'Oran
Mai 1962


P 255

PROCES VERBAL D'ENQUETE

Une de nos lectrices nous a adressé ce document que nous reproduisons.

Le Huit Mai 1962, les enlèvements se multipliaient. Le cessez-le-feu du 19 mars n'était observé que par I'armée française qui ne pénétrait plus dans les quartiers arabes où le F.L.N. faisait la loi. Les autorités françaises s'acharnaient contre les pieds-noirs et I'O.A.S. et la population européenne était ainsi prise entre deux feux : Gardes mobiles, Gendarmes rouges appuyés par I'armée multipliaient les perquisitions, les arrestations arbitraires et les expulsions, sans oublier les vols sous le couvert du couvre-feu et les déprédations volontaires dans les appartements perquisitionnés.

Le F.L.N. perpétrait en toute impunité les enlèvements et les assassinats d'Européens sans défense. Cependant il arrivait que les Gendarmes arrêtent un Musulman en flagrant délit de meurtre ou comme c'est le cas ici, un homme qui se substituait a I'autorité française encore en vigueur dans un secteur autre que les quartiers arabes.

On peut cependant en déduire que les autorités françaises connaissaient les adresses des centres où étaient détenus les disparus européens et I'identité de leurs tortionnaires ET QU'ELLES ONT LAISSÉ FAIRE SANS INTERVENIR, et cela depuis le 19 mars 1962 au moins et peut-être avant.

---ooOoo---

P.V. N° 658/R DU 4 MAI 1962

GENDARMERIE NATIONALE

 

PROCES VERBAL D'ENQUETE PRELIMINAIRE

ARRESTATIOIM DE CHOUAIL CHAIBA KADAY

Ce jour huit Mai mil neuf cent soixante deux

LAUDETTE Jean A/C O.P.J. Cdt. Brigade ORAN

HOEL Alexandre MDL Chef OPJ Cdt Brigade ORAN

CALLEJAS Maurice

CANOVAS Gilbert

DE VARGAS Joseph

EXPEDITION... de la Brigade des Recherches d'Oran,

Vu, les articles 17 a 19 et 75 du Code de Procédure pénale, rapportons les opérations suivantes que nous avons effectuées, agissant en uniforme et conformément aux ordres de nos Chefs :

PREAMBULE

Le quatre Mai Mil neuf cent soixante deux, à seize heures, s'est présenté à notre brigade un officier du 1/27ème Régiment d'Artillerie, conduisant un individu F.S.N.A. qu'il avait appréhendé au cours d'un contrôle "Patrouille Mobile" vers 10 heures, alors que ce dernier effectuait des contrôles et fouilles de véhicules civils circulant avenue de Sidi-Chami à Oran.

Au moment de I'arrestation, il était vêtu d'une tenue de toile kaki, coiffé d'un calot vert et blanc avec une étoile. II s'agit du nommé CHOUAIL CHAIBA KADAY, né le 20mai 1936 à ORAN. .

ENQUETE

Procédant à I'enquête, nous Gendarmes de VARGAS, entendons :

CHOUAIL CHAIBA KADAY, né le 20 mai 1 936 à ORAN, alias "SI NACEREDINE" demeurant à la cité Sanchidrian, 6 rue Agathe à Oran, fils de feu Abdelkader et de Chouail Chaiba Zahya célibataire, qui nous déclare à 8 heures, le 5 Mai 1962 :

"Hier 4 mai 1962, vers 10heures, lorsque les militaires m'ont appréhendé je réglais la circulation sur la V.O. N°9 au Petit Lac. J'étais vêtu d'une tenue militaire de toile kaki avec insigne FLN et coiffé d'un calot vert et blanc frappe de I'étoile et du croissant. Dans

l'Organisation FLN, je suis chef de la Police sous les ordres du responsable ATTOU, qui me paye 30.000 anciens francs par mois.

"Mes fonctions au sein de cette organisation consiste :

1) à soigner les malades, en qualité d'infirmier

2) je m'occupe de la police du Petit Lac avec mon équipe, je surveille la fouille des véhicules et des occupants de pas­sage dans mon quartier, en qualité de lieutenant.

Pour ma part j'ai APPREHENDE UNE DIZAINE D'EUROPEENS, que j'ai conduit au centre médical du Petit Lac auprès de ATTOU.

Parmi ceux-ci, il y avait :

MARTINEZ, 50 ans, LOPEZ, 35 ans, HERNANDEZ, 32 ans, MACIA, 39 ans, GARCIA, 40 ans, FERNANDEZ, 27 ans, LOPEZ, 30 ans, GIL, 55 ans, MARSIA, 45 ans.

"Ces F.S.E. ont été ensuite dirigés par I'adjoint de ATTOU surnommé "SI KADDOUR" au centre d'interrogatoire, 23 rue Général Brossard à Oran.

"Les victimes étaient vêtues uniquement de leur pantalon et d'un maillot de corps; Elles ont subi les sévices suivants :

Nombreux coups de cravache sur diverses parties du corps, par le chef "NOUREDINE", arrosage d'eau a I'aide d'un tuyau par "SI MOHAMES". Tortures à I'électricité par

"SI AISSA". J'ai assisté à ces supplices en tant que membre de la Police F.L.N. Les victimes criaient de douleurs.

"II existe à la Cité des 4 chemins, rue 7 n° 220 des "abattoirs" tenu par Lachcene Lahouari et son équipe.

Tous les gens ont été contrôlés et appréhendés par Belacène Lahouari dans le secteur de I'autoroute et de la Cité des 4 chemins, ont été directement dirigés aux abattoirs.

"Là, ils ont été étranglés ou égorgés par Belacène Lahouari, qui sans pitié puis jetés dans la Sebkra du Petit Lac.

"Je n'étais pas présent lorsque ces victimes ont été tuées, mais c'est Belacène lui-même qui nous faisait part de ses méfaits. Je compte environ 30 personnes du sexe masculin assassinés par Belacène Lahouari et son équipe suivant les dires de ce Chef.

"Toute I'organisation FLN de la région dépend de I'ALN mais nos membres agissent à leur guise.

"Chacun profite de la situation : suivant son rang et son autorité, ATTOU a été récemment battu et blessé très sérieusement par des Officiers de I'ALN pour sa conduite. "Le Centre Médical du Petit Lac est tenu par le docteur NOUVIAN, 50 ans. Je connais aussi le Professeur JEANNOT, 22 ans, qui doit instruire les jeunes musulmans.

Le 5 mai 1962 a 9 heures.

Lecture faite par moi de la déclaration ci-dessus, j'y persiste et n'ai rien à ajouter, a y changer ou a y retrancher (a signé au carnet de déclaration).

Vu les articles 63 et 65 du code de procédure pénale, pour les nécessités de I'enquête nous estimons devoir retenir CHOUAIL CHAIBA KADAY au bureau de la Brigade. Cette mesure de garde à vue prend effet du 4 mai 1962 à 16 heures. De 16 heures le 4 Mai 1962 à 8 heures le 5 Mai 1962 CHOUAIL CHAIBA KADAY a bénéficié d'un temps de repos de la chambre de sûreté de notre brigade. A 14 heures, nous procèderons à une seconde audition de CHOUAIL CHAIBA KADAY, qui déclare :

S.I., les hématomes, ecchymoses et blessures que je porte à la tête, aux poignets et au corps proviennent des coups que j'ai reçu de la part de ATTOU et de I'ancien "Fidai"

BOUCEMA KADDA". Ils m'ont frappé pour mon manque d'énergie au sein de l'organisation F.L.N. "

S.I : « je ne connais pas la destination des gens appréhendés par notre organisation, je me contentais de conduire nos prisonniers au Chef ATTOU et il m'arrivait souvent d'assister aux interrogatoires ».

"MOHAMED BEN KADDA JEN"(Démon-diable) demeurant au N° 10de la cité du Gai Logis est le chef "Fidai" tueur de la région, cité des Oliviers et du Gai Logis. Le chef des abat­toirs a 5 hommes sous ses ordres qui sont : KADDOUR -TAYEB -KOUIDER et AISSA et le FLN KADER. Ils sont tous armés de P.A. 9m/m. Je sais qu'une vingtaine de F.S.E. et une dizaine de F.S.N.A ont été tués par I'équipe de Belacène Lahouari. Ces chiffres ne sont qu'approximatifs. J'ignore si des militaires ont été appréhendés par notre organisation et s'ils ont été tués ou relâchés ».

Le 5 mai 1962 a 14 heures 30.

Lecture faite par lui de sa déclaration, y persiste n'a rien a y changer, a y ajouter ou a y retrancher. (A signé au carnet de déclaration).

"En raison des indices graves et concordants qui dans I'état actuel de I'enquête existant contre "CHOUAIL CHAIBA KADAY" de nature à motiver son inculpation pour "Séquestrations arbitrages et complicité d'assassinats", le 5 Mai1962 à16 heures, nous portons ces faits à la connaissance de Monsieur le Procureur de la République d'Oran. Ce magistrat nous fait part de nouveaux textes permettant une garde à vue de quinze jours.

"Procédons une fouille à corps de CHOUAIL CHAIBA KADAY, lequel n'a été trouvé porteur d'aucun objet dangereux susceptible de servir à la manifestation de la vérité.

"Le 5 mai 1962, à 19 heures, nous procédons à une nouvelle audition de CHOUAIL CHAIBA KADAY, lequel n'a été trouvé porteur d'aucun objet dangereux susceptible de servir à la manifestation de la vérité.

"Le 5 mai 1962, à 19 heures, nous procédons à une nouvelle audition de CHOUAIL CHAIBA KADDA qui déclare;

 

"Le 27 avril 1962 entre 12 et 13 heures, avenue de Sidi-Chami, j'ai arrêté une dizaine d'européens, je ne connais pas leur nom. Ils étaient dans deux voitures, il y avait une Simca grise où ils étaient 5 personnes, rien que des hommes âges de 25 à 50 ans. Nous avions mis des pierres en travers de la route. Nous étions 6 policiers et la foule évaluée à 60 personnes toutes musulmanes.

La foule possédait des pierres, des bâtons ainsi que des couteaux. Nos policiers et moi étions armés de Beretta 9mm avec chargeurs pleins. Ces P.A. n'avaient pas de numéros. C'est cette Simca qui est arrivée la première sur le barrage.

La foule commença à jeter des pierres et à casser les vitres de celle-ci. Les 5 occupants ont bien été massacrés par la foule pendant 10 minutes. Au moment est arrivée une autre voiture, marque Versailles, chargée de 5 occupants européens. Entre temps étaient passées d'autres voitures conduites par des Musulmans que nous avions laissées passer après contrôle.

Cette Versailles a fait I'objet également de jets de pierres de la part de la foule, les occupants ont été massacrés aussi. Je suis monté au volant de la Versailles en repoussant le chauffeur. Un de mes policiers Mohamed Ben Driss, 22 ans demeurant Bloc 13 n° 25 au Petit Lac à bord de la Simca. Nous avons regagné le S.A.U. (Petit Lac) poussés par la foule escortée par nos policiers, les occupants des voitures n'avaient fait jusqu'à ce moment I'objet que de coups de pierres.

Nous avons fait entrer les 10 occupants dans la salle de la S.A.U., la foule est restée dehors. Elle voulait entrer dans le bureau avec mes policiers, je l’ai empêchée. "Kaddouri Mohamed, chef Fidai, était là avec son équipe, "Nous avons du sortir, des voitures, les Européens en les tirant par les bras, ils ne marchaient plus, ils étaient presque morts à la suite des coups de pierre. Nous les avons allon­gés les uns sur les autres en tas dans le bureau, ils respiraient encore. Kaddouri les a fouillés et leur a enlevés les portefeuilles qu'il a gardé. J'ignore ce qu'il en a fait. C'est alors que le grand patron ATTOU chef du secteur du Petit

Lac est arrivé. II a fait venir une infirmière nommée Kheira. Elle leur a pratiqué les premiers soins (Mercurochrome). Par la suite, nous les avons conduits tous les 10 au centre médical. Ils sont restés là une semaine. Lorsqu'ils ont été mieux ATTOU les a interrogés leur demandant s’ils faisaient partie de I'O.A.S. Evidemment, ils ont dit non et ATTOU les a relâchés, mais la foule venue nombreuse autour du Centre les a immédiatement lynchés à mort à coups de pierres et de couteaux ».

 

S.I, « je l’ai vu, j'étais présent ».

 

S.I. « la foule a embarqué les 10 cadavres sur une camionnette 203 Peugeot bâchée et les a conduit à la Seb-kra du Petit Lac, j'ignore l’endroit exact ».

 

S.I. « les noms que je vous ai donnés dans la première déclaration sont faux car je n'ai pas vu leur identité et je ne leur ai pas parlé ».

S.I. « je sais que de nombreux européens ont ainsi été lynchés par la foule et qui même ont été conduits morts au Petit Lac. Des femmes et même des enfants sont morts ainsi, les véhicules de ces victimes sont gardés par nous et les pièces de certaines servent à réparer les autres.

"Avant les 10 européens dont je viens de parler, j'en ai attrapé d'autres dans les mêmes conditions. Je me souviens plus particulièrement de 4 européens dans 2 véhi­cules. L’une, une Dauphine rouge, l’autre une Simca Aronde ancien modèle Ils avaient eux aussi été massacrés par la foule à coups de pierres, avenue de Sidi-Chami. Eux aussi ont été amenés à la S.A.U. du Petit Lac par moi et mes hommes dans le but de les torturer à la cravache.

 

Dans le bureau de la S.A.U., le nommé Mohamed les a arrosé d'eau. Nous ne les avons pas attachés, car ils étaient assommés et saignaient de la tête, nous les avons mis torse nu et je les ai frappé avec une cravache (nerf de bœuf). Cette arme est actuellement dans mon bureau de la S.A.U. Durant un quart d'heure Kaddouri et moi les avons frappés ».

 

"S.I. « Je les ai frappés parce que c'étaient des pieds-noirs, j'ai reconnu que c'étaient des pieds-noirs parce que l’un d'eux avait le cachet de I'O.A.S. imprimé à l’encre bleue dans le dos. Les autres n'avaient rien mais je les ai frappés aussi, car ils étaient ensemble.

"Apres les avoir frappés, j'ai sorti mon 9 mm et j'ai tiré deux balles à bout portant dans la tête sur deux d'entre eux Kaddouri a tiré de la même manière sur les deux autres européens.

"Puis, nos hommes ont embarqué les cadavres dans la camionnette Peugeot 203 374 EX 9G qui se trouve encore à l’heure actuelle au Petit Lac, Kaddouri a pris le volant et est parti avec 6 hommes armés de Beretta.

"C'est Kaddouri qui a pris là encore les portefeuilles. S.I. J'ignore l’identité de ces victimes. S.I. Je sais que sur les 10 premiers, 4 ont été égorgés par la foule, mon camarade Abdelkader Ben Noucehn demeurant a la cite des Oliviers me l’a dit et d'ailleurs ils étaient armés de couteaux et de haches. Sur les 4 autres un seul a été égorgé par Kaddouri.

C'est tout ce que j'ai fait depuis la deuxième fois que je suis au Petit Lac. II y a d'autres groupes qui font comme moi la chasse, avec la foule musulmane, aux Européens. "J'ignore combien ils peuvent en avoir tués. J'en ai vu 4, égorgés par Belkacem Laouar aux 4 Chemins comme je vous l’ai déjà dit, rue 7, le numéro que je vous avais donné est faux, car je l'ignore. Belkacem en a égorgé 20 environ. La pièce ou ont lieu ces égorgements est grande, n'a qu'une fenêtre qui donne sur la rue 7, pas de meubles, pas d'abat-jour. Les 4 corps étaient dans le fond de la pièce, face à la porte. Cette pièce est éclairée par une ampoule. Les murs de cette pièce sont peints en rouge avec une bande noire près du plafond qui est blanc.

"Au moment de mon arrestation par les militaires, je n’étais pas armé, j'avais laisse mon revolver au bureau. "Je sais aussi qu'ATTOU a torture à l’électricité une musulmane enceinte sous les yeux de son mari. II a aussi emprisonné des musulmans.

Le 5 Mai 1962 à 10 heures 30.:

Lecture faite par moi de la déclaration j’y persiste et n'ai rien à y changer, à y ajouter ou à y retrancher. (A signé le cahier de déclaration)

 

Le 7 Ma i 1962, à notre brigade, nous gendarme CALLEJAS entendons : ANTON Yvon né le 8 février 1951 à Oran qui nous déclaré à 11 Heures 15 en présence de sa mère, Madame ANTON Françoise :

Le mardi 17 avril 1962, je me trouvais dans le véhicule de mes parents et avec eux lorsque passant Avenue de Sidi-Chami en direction de La Sénia un F.N.S.A nous a lancé une pierre sur notre 4 CV Renault Grise. Plus loin une voiture, genre Aronde camionnette, couleur bleu sale, toute rayée (peinture enlevée) venant dans notre direction de marche nous a dépassés et s'est mise en travers nous barrant la route. Mon père qui conduisait a du immobiliser notre voiture pour éviter la collision. II y avait une foule de gens F.S.N.A. Parmi eux certains étaient porteurs de haches. Un F.N.S.A s'est adressé alors à nous, nous ordonnant de descendre. Mon père a mis pied à terre ainsi que ma mère tandis que je descendais de la voiture. J'ai fait le tour du véhicule vers l’arrière pour descendre ma petite sœur Joëlle âgée de 8 ans et demi. A ce moment précis, j’ai remarque la disparition de mon père. Ma mère était amenée par deux musulmans que la poussaient vers la route principale du Petit Lac, voyant cela ma petite sœur et moi avons suivi ma mère et ses gardiens et les avons rejoints à l’hôpital du Petit Lac. Nous avons été placés dans une pièce ou il y avait un tas de linge, nous avons été libérés le soir même sous la conduite d'un garde mobile.

Parmi toutes les photos que vous me présentez, je reconnais formellement l’une d'elles qui représente le por­trait du chef fellagha qui est venu nous rendre visite au centre médical du Petit Lac (NOUREDINE, alias BENOUACEUR, alias SI OMAR). Je n'ai plus revu mon père.

Le 7 mai à 12 heures.

Lecture faite par moi de ma déclaration ci-dessus, j'y persiste et n'ai rien à y changer à y ajouter ou à y retrancher. (L’intéressé, mineur, n'a pas signé le carnet).

 

Même jour, même lieu, nous Gendarme CALLEJAS, nous entendons :

ANTON Françoise, née de la CRUZ le 1/11/1929 à Oran, demeurant Cité Jean de la Fontaine Bt C.A et Rue Président Fallières à Oran, nous déclaré à 12 heures 30 : le 17 avril je me trouvais dans le véhicule 4 CV Renault 729 DE 9C conduit par mon époux. Nos deux enfants se trouvaient sur la banquette AR. Nous roulions sur l’Avenue Sidi-Chami en direction de La Sénia, il était 8 h 30 environ lorsqu'au milieu de cette artère un F.N.S.A. nous a jeté une pierre et mon mari a accéléré. Cent mètres plus loin une camionnette tôlée genre Simca ou Juva quatre de couleur bleu sale et rayée de blanc nous a doublé et s'est mise en travers de la route. A bord de ce dernier véhicule, il n'y avait qu'un seul F.N.S.A. d'une trentaine d'années, brun portant une mous­tache, mon mari a du s’arrêter pour éviter le pire. La foule musulmane s'est alors précipitée sur nous, du côté gauche de la voiture un FNSA a frappé à la portière intimant l’ordre d’ouvrir, ce que j'ai fait.

II a alors jeté toutes les affaires et paquets que je tenais sur mes genoux et a fouillé le véhicule. Sur son ordre, j'ai mis pied à terre. J'ai immédiatement été isolée du reste de la voiture. Deux musulmans m'ont pris par la main et m'ont entraîné à vive allure vers leur hôpital. La foule se montrait haineuse et voulait me battre. Durant ce trajet, j'ai vu un groupe de musulmans qui entraînaient mon mari et le frappaient violemment. A ce moment là, un camion G.M.C militaire est passé sur le terre-plein de l'hôpital et les militaires m'ont regardé. Je leur ai fait signe "Au secours !", les appelant désespérément, car j'avais alors les mains libres, le camion a marqué un net ralentissement les militaires m'ont regardé et sont repartis ! Avant d’entrer dans hôpital j'ai tourné la tête et j'ai vu mon mari par terre et des arabes qui s’acharnaient sur lui. Puis, on m'a fait entrer dans une pièce avec mes 2 enfants qui me suivaient librement. Vers 13 heures, un gendarme mobile sans arme est arrivé et j'ai été libérée avec mes 2 enfants, et 10 F.N.S.A. qui étaient détenus dans un autre local de l'hôpital. Au moyen d'une Jeep et de 2 half-tracks, nous avons été dirigés sur le P.C. du Cdt HUGON, avenue de Sidi Chami puis au Lycée Ardaillon chez les gendarmes mobiles. A 17 heures enfin j'ai pu rejoindre mon domicile.

Durant mon séjour à l’hôpital des fellaghas du Petit Lac, plusieurs chefs FLN et des infirmières sont venus me rendre visite, ils m'ont dit que je ne risquais rien, qu'ils m'avaient placée là pour ma sécurité.

Parmi les photos que vous me présentez je reconnais formellement l’une d'elles qui représente le portrait du chef fellagha qui m'a parlé BOUMEDIENNE Ali, alias BENAOU-MEUR, alias SI OMAR.

S.I. Je reconnais l’individu que vous me présentez et que vous dites se nommer CHOUAIL CHAILA. Ce dernier était parmi la foule et les individus qui m'ont arrêtée. Je l’ai revu dans la cour de l'hôpital fellagha.

Ce jour-là vers 12 heures, l’un des membres FLN de cet hôpital un européen d'origine métropolitaine est venu prendre ses repas avec les autres malfaiteurs; je l’ai supplie de me donner des nouvelles de mon mari. II est sorti et quelques instants après il est revenu en me disant que mon époux se portait bien et qu'ils l’interrogeaient. J'ai vu un docteur européen âgé de 60 ans environ aux cheveux blancs (Docteur NOUVIAN) qui s'occupait des malades. J'ai conversé quelques instants avec lui, il m'a dit qu'il était là depuis 2 mois mais ne m'a pas révélé son identité.

Je n'ai plus revu mon mari ni notre voiture. Je n'ai su qu'il y avait des européens prisonniers en même temps que moi que lorsque nous avons été conduits ensem­bles vers le PC du Cdt HUGON. II y avait alors 10 hommes, mes 2 enfants et moi-même.

Je précise que les membres du FLN ne m'ont pas interrogée, je n'ai pas subi de sévices de leur part.

Le 7 mai 1962 a 13 heures.

Lecture faite par moi de la déclaration ci-dessus, j'y persiste et n’ai rien à y ajouter ou à y retrancher (a signé le carnet de déclaration).

 

Après avoir confronté Mme ANTON Antoine avec CHOUAIL CHAILA KADAY, nous recueillons une nouvelle déclaration de ce dernier à 14 heures.

"J'ai vu la dame européenne ici présente que vous dites se nommer Madame ANTON au centre médical du Petit Lac en conversation avec BENAOUMEUR alias SI OMAR en réalité BOUMEDIENNE Ali). Ce dernier est le grand chef pour tous les quartiers d'Oran. II est sous les ordres d'ABDELHAMID.

"S.I. L'individu qui conduit la camionnette Renault Blanche et une 403 noire avec poste de radio sur l’avenue Sidi Chami et au Petit Lac est le Fidai BOUCERA Kada, c'est certainement lui qui a provoque l’arrêt de la 4 CV de M. ANTON, d'ailleurs il correspond au signalement donné par Mme ANTON, II porte une moustache, il loge au Gai Logis. "Je n'ai pas vu M. ANTON mais j'ai appris par les membres de mon organisation qu'il avait été tué par eux et son corps jeté à la Sebkra, car tous les morts sont conduits là-bas. Parmi les photos que vous me présentez, je reconnais formellement l'un d'entre eux qui représente les portraits de :

1) Un individu au visage noir portant de grandes mous­taches, qui conduit un V.L. genre américain, je ne connais ni son nom, ni sa fonction au sein de I'ALN (Tenazet Abdelkader "SI KOUIDER").

2) ZAFF Djillali, recherché par les forces de l’ordre actuellement au maquis de I'ALN, il habitait à Sanchidrian près de mon domicile.

3)Le grand chef "SI OMAR" précédemment désigné alias BENAOUMEUR (BOUMEDIENNE Ali).

 

"Depuis que je travaille pour I'ALN c’est-à-dire depuis le cessez-le-feu, j'ai eu l’occasion de connaître divers locaux de l’organisation qui sont installés ainsi que suit :

- A la cité des 4 chemins, rue 7 les "Abattoirs" tenus par BELAHCENE Lahouan.

- 2 bureaux de la cité des Oliviers, sans adresse précise.

- Le centre médical du Petit Lac, en bordure du V.O. n° 9 ou se trouvait Mme ANTON et le Docteur NOUVIAN.

- La S.A.U. du Petit Lac ou les gens subissent des sévices de KADDOURI Ben MOHAMED et de son équipe.

- Le grand centre ou les F.S.E. sont habituellement emprisonnés sis 23 rue Gl Brossard. Ce lieu est dirige par SI NOUREDINE;

"J'ai remarque devant ce local un nombre important de véhicules volés ou appartenant aux F.S.E. prisonniers. "Je sais qu'il existe d'autres locaux dits 2eme bureaux, mais je ne connais pas leurs adresses exactes, néanmoins ils sont situés au Douar Montréal, au douar de la Gare, à La Sénia, à Cholet, à la Cité du Petit Lac, rue Mohamed Bey en ville nouvelle et rue des Amandiers au Faubourg Lamur..

Le 7 Mai 1962 à 15 Heures.

Lecture faite par moi des déclarations ci-dessus, j'y persiste, je n'ai rien à y ajouter, rien à changer ou à retrancher (a signé au carnet de déclaration).


 
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