LES BARBOUZES
Par Antoine Martinez
Brève présentation.
Nom
officiel : MPC (mouvement pour la communauté)créé le 9 juillet 1959 Président
fondateur : Jacques Dauer, secrétaire général Lucien Bitterlin.
Le MPC mouvement à tendance Gaulliste de gauche, était donc chargé en
quelque sorte, d'en assurer la devanture respectable et légale. Lucien
Bitterlin à toute latitude pour agir suivant les directives de la
direction.
L'implantation du MPC en Algérie débute en mars 1960.
Yves le Tac est nommé président, Lucien Bitterlin secrétaire général,
Jean Dubuquoy responsable administratif pour Alger. (Yves le Tac
fut mis hors d'état de nuire malgré quatre tentative d'attentats manquées
entre le 13 novembre 1961 et le 18 février 1962).
C'est à Paris, octobre1961, cabinet de l'avocat maître Lemarchand que
sont mises en places les nouvelles orientations concernant la lutte contre l'OAS.
En présence notamment de Roger Frey ministre de l'intérieur et de son
adjoint, Alexandre Sanguinetti ( responsables du cabinet anti OAS), Lucien
Bitterlin, Fred Simon représentant parisien du MPC.
Membres du comité directeur : Charly Bonardi, Youssef
Benhoura, son beau frère Nouar, et le père Badin.
Chef du service action : Barthélémy Rossello. Il s'illustrera dans
l'infiltration des réseaux OAS. Il transmettait ses résultats au commissaire
principal Gautray et à son adjoint Nivos, des RG, qui étaient en
étroite relation avec le cabinet de Roger Frey.
But
officiel :
permettre la réconciliation et l'association France Algérie des communautés
en vue de préparer le régime démocratique de l'Algérie nouvelle
But
réel :
s'opposer à l'OAS par tout les moyens et mettre un terme aux agissements
des commandos Delta de Degueldre et Z de Susini.
Le 15 Octobre 1961 la section algérienne s'appellera « Mouvement Pour la
Coopération »
Rayon d'action tout le territoire algérien en toute indépendance.
Les
ordres devaient venir du cabinet anti OAS.
En Algérie le délégué général Jean Morin sous les ordre de Louis
Joxe et de son chef de cabinet Jacques Legrand et ses adjoints,
Verger et Vieillecazes, devaient être mis au courant des actions
de ces commandos.
C'est
donc une organisation secrète au service du pouvoir, qui avait pour but d'accélérer
la mise en place de la politique d'abandon de l'Algérie et d'anéantir, par
tous les moyens, les derniers opposants. C'est une véritable police parallèle
qui reçoit ses ordres des plus hautes sphères du gouvernement.
Première
remarque :
Il est impensable que le premier ministre Michel Debré,
qui avait autorité sur le ministre des armées P
Mesmer, sur le ministre de l'intérieur R
Frey, et sur le ministre des affaires algériennes L
Joxe, n'ait pas eu connaissance de ce mouvement.
Deuxième
remarque :
Il est également inconcevable quand on connaît les personnalités des uns et
des autres, que le chef de l'état lui même n'ait pas eu vent de
" l'affaire ".
Monsieur Charles de Gaulle, Président de
la République ainsi que Monsieur Michel Debré
Premier Ministre savaient, et même s'ils ne voulaient pas prendre connaissance
des " détails ", ils étaient complices des futures actions.
Les
moyens.
L'assistance matérielle sera assurée par le colonel Laurent responsable
de la sécurité militaire en Algérie, sous le commandement de Pierre
Mesmer ministre des armées.
Le directeur de la police judiciaire, Michel Hacq responsable de la
" mission C " aidé par le commissaire Grassien, qui mettent
200 policiers métropolitains envoyés en Algérie, à la disposition des
barbouzes en Algérie.
Aide matérielle de divers groupements gaullistes.
La publicité et documents officiels (laisser passer, permis de port d'armes ..
.) furent assurés par la délégation du gouvernement. (Morin et Verger).
Origines des renseignements : RG, PJ, DST, sécurité militaire, MPC, mission
" C ".
Aide de l'organisation DRF " Défense de la République Française ",
très proche du MPC dont le chef était Robert Lavier, proche de Michel
Debré. Lavier entraîne avec lui Frank Masson (casque d'or)
et le colonel Foyer ( Boissière)
La SEDA (Société Européenne de Diffusion en Afrique)
chargée entre autres, d'assurer la paye des barbouzes.
Une
trentaine de véhicules (403, 404 et camionnettes), faux papiers lots d'armes et
explosifs de toutes sortes (fournis par la Sécurité Militaire),
des ports d'armes ainsi qu'un pécule de 60 millions d'anciens francs
furent débloqués grâce à Jean Morin.
Novembre 1961 réunion avec L Bitterlin, et les hommes de la Délégation
Générale (qui dépendaient du cabinet du ministre des affaires algériennes Louis
Joxe), A Goulay, J Morin, C Vieillecazes et L Verger.
Elle portait sur le recrutement de trente cadres permanents majoritairement
européens et de quatre vingts militants qui comptaient quelques musulmans
nationalistes. Budget 60 millions d'anciens francs de l'époque.
L'OCC (Organisation Clandestine du Contingent), formé de jeunes
appelés, interviendra également dans certaines actions.
Le GAR Groupe d'Action et de Résistance d'extrême gauche qui grâce aux RG éditèrent
les affiches avec les photos des commandos Delta.
Chronologie
sommaire des actions du MPC à Alger.
Le 6 novembre1961 A Goulay et L Bitterlin, rencontrent à Paris Pierre
Lemarchand qui assure pouvoir trouver de la " main d"œuvre
". madame Lemarchand réglera les problèmes de logistique et
d'intendance.
Première recrue : Pierre Lecerf
PC installé à la villa " Dar es saada " ou villa " Andréa
" dans le quartier de " El Biar "
(Pour Orléansville, Guy Gits sera le responsable qui travaillera étroitement
avec le préfet Mohand Ourabah. Son collaborateur Bovis sera éxecuté
le 16 novembre 1961 par l'OAS.)
Début des opérations le 13 novembre 1961 à 0 heure. Une centaine d'hommes
sont lâchés dans la ville pour infiltrer les réseaux OAS.
A Alger, Trois équipes :
- Lavier : Place du gouvernement, bab el oued, square Bresson et Bd de la
République.
- Dubuquoy : centre d'El Biar.
- Lecerf : Champ de manœuvre, ru de Lyon, Belcourt, Kouba et Hussein Dey.
- André Laurent à la sécurité militaire, coordonnait, analysait et
traitait les renseignements et avait fourni, au MPC, des armes prises au FLN.
Le 28 novembre, André Palaccio qui avait en charge de retrouver la trace
du général Salan, est gravement blessé par balles à Alger.
Son frère est abattu le jour même à Maison Carrée.
20 novembre nouvelle tactique des barbouzes : le contre plasticage. L'objectif
faire sauter les fiefs de l'OAS pour retourner la population contre elle. Sept
établissements publics (bars et brasseries) sautèrent dans la nuit du 20 au 21
novembre 1961.
Embauche
de nouveaux volontaires.
A Orléansville, deux chefs de secteur, huit responsables et vingt huit
militants. Leur groupe de choc était constitué de six baroudeurs triés sur le
volet.
Deux autres villas furent louées à Alger dont l'une à Hydra abritait le siège
de la SEDA
Suite à la riposte de l'OAS qui entreprit la traque des Barbouzes, le MPC
s'attela à un nouveau recrutement de " soldats " plus ou moins
recommandables par l'initiative de Dominique Ponchardier.
Ces nouveaux commandos serait appuyés par le soutien logistique d'une nouvelle
recrue ; Ettore Lobianco dit " Mario " assisté de Gérard
Maugueret et de Michel Dirand. Gaston Quetel (vice président du MPC)
assurerait l'information de Dauer sur les activités en Algérie, de ces
hommes.
Madame Lemarchand était chargée de transférer ces nouveaux venus que
l'on appellera " colis ".
Le 2 décembre 1961 débarque à Alger sous la responsabilité de Michel Hacq
" professeur Hermelin " (directeur central de la PJ), des
commissaires et officiers de police, qui s'installent à l'école de police
d'Hussein Dey.
C'est Renato Hernandez, officier de police, qui assurera les contacts
avec le MPC.
Le PC central sera établit dans une quatrième villa proche du Palais d'été,
" Dar Likoulia ".
6 décembre 1961 arrivaient à Alger neuf recrues quatre européens dont Viorme,
Joseph Toniton, Alain Belaïche, ainsi que le père et le fils Amar,
et quatre vietnamiens commandés par Jim Alcheik " Lassus " et
de son adjoint Roger Bui-Thé. Tous spécialistes de sports de combats,
ils formeront le commando " talion " qui montrera très vite une
efficacité redoutable. Ils seront logés dans une cinquième villa qui sera
vite abandonné au profit de la fameuse villa Andréa. Ils auront pour objectif
principal : Annihiler la propagande OAS qui s'exprimait spectaculairement par
des émissions de radio pirates.
Après plusieurs attaques de l'OAS contre des
responsables ou de gardes du corps du MPC, ce dernier se lancera dans des
kidnapping .
Trois
techniciens de la société SN Repal sont enlevés par P Lecerf et torturés
pour leur faire avouer une hypothétique collaboration à l'OAS. Ils seront
" débarrassés " vivants dans El Biar.
Fernand
Lopez
agent immobilier est ensuite kidnappé pour les mêmes raisons.
Le 22 décembre Claude Veillard barbouze et gorille du vice président du
conseil général d'Alger fait sauter le restaurant " Le grand Rocher
" repaire des cadres de l'OAS. Douze morts sont
ramassés des débris.
Peu avant Noël, nouveau colis : Jacques Andréi.
Dans la foulée Christian David (qui assassinera le commissaire Gallibert),
François Marcantoni garde du corps d'Alexandre Sanguinetti et
truand notoire, Ange Simonpieri , Marcel francisci, Dominique
Venturi " Nick ", qui s'illustreront dans le domaine de la drogue,
Glaise secrétaire de FO, s'impliqueront dans la lutte anti OAS.
Le 31 décembre 1961, Marcel Hongrois " le Chibani " dynamite
un café point de chute de l'OAS.
Onze mort et vingt trois bléssés.
Le
31 décembre 1961 Attaque au bazooka du repaire barbouzes de la rue Faidherbe
par six commandos deltas.
Après le décrochage des deltas, le sous brigadier François Paoli est
tué par les barbouzes qui le confondent avec un renfort OAS.
Quatorze morts et deux blessés coté barbouzes qui ne déclareront qu'un
seul blessé.
1er janvier 1962 Michel Massenet adjoint de Degueldre est tué à
main nu par un vientnamien.
Arrivé ensuite à Alger Clauzure, Biard, Pelletier, Hortenzi
et Gauthier, membres du SAC (Service Action Civique) dont le chef sera Jacques
Cohen " Mustapha ".
Le 10 janvier 1962 l'activité du MPC est légitimée par les hautes instances
Parisiennes.
Le 12 janvier 1962 Michel Lievin des commandos delta est capturé et
torturé par les vietnamiens d'Alcheik.
Il sera mis dans un tel état que la mission " C " lui fera signer une
décharge avant de l'incarcérer.
A partir du 10 janvier D Ponchardier reçoit l'investiture du MPC. Il y déploiera
un zèle impressionnant.
Le 23 janvier 1962 nouvelle mission ordonnée par le
ministre de l'intérieur : Détruire l'émetteur pirate de l'OAS Alger.
José
Salord
est enlevé et torturé ainsi que Albert Coronal qui sera supplicié
pendant plusieurs heures.
Le 27 janvier 1962 Henri Vinent est capturé et atrocement torturé dans
la cave de la villa " Andréa ". Il fut remis à la police légale de
Hussein Dey qui authentifièrent les tortures. Les plaintes déposés ne connurent
jamais de suite....
Alexandre
Tislenkoff
, technicien radio des émissions pirates est à son tour kidnappé. Il est
torturé vingt quatre heures durant. Un de ses collaborateurs est également
intercepté. Il sera achevé d'une balle dans la nuque et enterré dans le
jardin.
La plainte déposée contre Pierre lemarchand par Tislenkoff, le
17 février 1966 n'aboutit pas plus même si une enquête
fut ordonnée.
M
Quidet
est torturé à son tour au même endroit et par la même équipe.
29 janvier 1962 Jacques Gosselin est arrêté et torturé. Tislenkoff,
Gosselin et Vinent ne durent leur salut qu'à l'explosion de la villa
qui fit dix neuf morts tous barbouzes et à l'intervention d'un commandant de la
gendarmerie mobile qui s'opposa à leur exécution sommaire par Christian
David " le beau serge " après la destruction de la villa.
D Ponchardier nomme comme remplaçant de Alcheik, Robert Morel
" Bob " ou " colonel Morel ".
Groupes participant à la lutte anti OAS contactés par Morel Le DRF , le
GAR.
On recruta alors dans le " milieu " marseillais.
Installation à l'hotel " Radjah ", qui sera attaqué sans
discontinuer par l'OAS.
Le 16 février 1962 quatre barbouzes seront exécutés dans leur voiture.
Le 7 mars 1962 Roger Frey donne l'ordre à Jean Morin de rapatrier en métropole
les survivants.
C'est donc la fin des opérations qui ont coûté un
milliard et demi d'ancien francs une centaine de morts barbouzes
(environ la moitié de l'effectif) et quatre cents morts et disparus coté OAS.
Des fouilles entreprises dans les jardins des villas en
1968 ont permis de mettre à jour une trentaine de squelettes dont certains
avaient le crâne percé.
Les
tortures perpétrées par les barbouzes étaient psychologiques et surtout
physiques. Coups, étranglements, électricité, ongles
arrachés, yeux crevés, brûlures, sont le lot d'horreurs
quotidien qu'ont à subir les malheureux prisonniers.
Le barbouzes ne sont pas intervenus uniquement à Alger, mais dans toutes les
grandes villes d'Algérie. A Oran notamment elles furent très " actives
".
On peu penser aussi que leur rayon d'action dépassait les frontières européennes,
et qu'ils " travaillaient " en étroite collaboration avec les
services officiels français et les polices étrangères. (voir l'enlèvement d'Argoud
en Allemagne)
Cependant la torture contre l'OAS ou les partisans de l'Algérie française ne
fut malheureusement pas une spécialité unique des barbouzes : Les gendarmes du
colonel Debrosse, les gardes mobiles à l'école de Police d'Hussein Dey,
Les policiers de la mission " C " dans la fameuse caserne des " Tagarins
" se sont également rendus coupables de crimes contre l'humanité.
Est
ce que notre histoire de France aura le courage d'en faire état un jour ?
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