PAROLES
DE DEBRÉ
LE CRAPOUILLOT N°93-page 10-
Recueilli
par Sivéra
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Ne doutons pas de l'avenir
« Quelle
meilleure manifestation des qualités nationales que la mobilisation des
Français pour la sauvegarde de « leur » Algérie ! (*)
Nos
princes avaient perdu l'Indochine, après de nombreux sacrifices et une grande
humiliation ; puis la Tunisie et le Maroc, sans combat, mais non sans honte.
Ils avaient laissé, par faiblesse et par incapacité, la guerre gagner
l'Algérie.
Alors ils ont appelé plus de trois cent mille Français, déjà installés
dans leur vie, à reprendre l'uniforme pour se battre.
Les princes qui étaient au gouvernement prirent cette décision contraints et
forcés, on pourrait presque dire « en se cachant ».
Aucun élan parti de leur cœur ne vint réchauffer l'ardeur des nouveaux
soldats. La plus grande part de la presse, suivant les instructions reçues ou
par mimétisme, se borna à publier les avis d'appel et les commentaires
patriotiques furent très rares.
Les journaux et les orateurs du Parti communiste eurent la faculté
d'attaquer la mobilisation et de décourager les citoyens rappelés.
Les grands chefs militaires n'eurent pas la liberté, ni peut-être le goût,
des proclamations chaleureuses : leur silence fut total. Les prêtres ne
furent pas plus loquaces : on n'eut guère connaissance que de quelques
homélies vantant la paix nécessaire aux jeunes ouailles qui partaient pour
la guerre. Presse et radio firent mieux : on put lire, on put entendre, quelques
déclarations favorables aux rebelles contre qui les jeunes Français
allaient se battre !
Telle fut l'attitude des princes ( ... ). Ils laissèrent se reconstituer
l'atmosphère de la « drôle de guerre » et, ainsi, se développer
les plus mauvaises propagandes, celles qui faisaient douter de l'avenir de la
France en Afrique. Que deviennent les qualités d'un peuple quand il est dupé
à ce point… »(*)
souligné par nous (N.D.L.R.)
Les bonnes invitations
« La tragédie de
l'Algérie peut-être décisive. Sauver l’œuvre française en Algérie
signifie maintenir l'autorité de la France. Tout nous invite à cette
politique : l'avenir de nos concitoyens et des musulmans qui nous ont fait
confiance, la paix en Méditerranée, l'équilibre politique de l’Afrique,
la sécurité des frontières méridionales de l'Europe » (1).
Tout foutra le camp
« Pour éviter que (la) révolution n'ouvre tout grand les portes à l'anarchie
et à la sécession, c'est-à-dire à la destruction de l’œuvre française
et, enfin de compte, à la fin de la France en Afrique, il faut une grande
fermeté dans les desseins et dans les actes, et une autorité qui inspire
confiance aux partisans, crainte aux adversaires.
N'insistons pas ; l'expérience est faite. Le régime n'est pas en mesure de
manifester cette fermeté : il est trop loin de toute vraie autorité, celle
qui peut réformer sans être renversée par ses réformes mêmes.
Alors l'Algérie est perdue... Le régime et nos princes n'y
résisteront pas ! La perte de l'Algérie entraîne celle de l’Afrique noire
et la France, en un temps très rapide, perd ses positions économiques et
stratégiques.
Ceux qui croient conserver les territoires lointains et peu peuplés, tel le Sahara,
alors que nous aurons abandonné une terre proche et peuplée de fils de
France, nourrissent une sotte illusion ». (2).
(1) (2) Michel Debré,
« Ces princes qui nous gouvernent », Plon, 1957.
Commentaire
de SIVÉRA
C'est
bien plus tard que les écrits de nos politiciens prennent toute leur saveur !
Comme disait en son temps,
"Le Fou Chantant","Longtemps , longtemps, longtemps,
après que le Poète ait disparu, son esprit traîne encore dans la rue".
Sauf que là, c'est le sort d'une Nation et de ses enfants qui étaient en
jeux.40 ans plus tard nous payons le prix fort pour les erreurs de nos
visionnaires.
Politiques &
Démagogie, même combat ?
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