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CE QUE JE N’AI PAS DIT
Par Le général JOUHAUD
Chez Fayard

SERMENT PRONONCÉ LE 7 JUILLET 1957  
PAR LES REPRÉSEN­TANTS OFFICIELS DES ANCIENS COMBATTANTS.

P.78 à 80

Un élément psychologique, plus important que les déclarations des politiques, fut le serment prononcé le 7 juillet 1957 par les représentants officiels des anciens combattants.

A qui revient cette initiative ?

Sans conteste à Auguste Arnould, animateur du Comité d'entente et d'action des anciens combattants d'Algérie 1.

Se faire entendre par la France était son souci constant. Avec l'appui de Jacques Soustelle et de son U.S.R.A.F. (Union pour le salut et le renouveau de l'Algérie française), il organise une cérémonie à Alger devant le Monument aux morts. Pratiquement, toutes les associations françaises d'anciens combattants y participèrent, depuis l'Union nationale des combattants (U.N.C.), l'Union des médaillés de la Résistance, la 3e D.I.A., la 2e D.B., les Combattants de l'Union française, l'Organisation de résistance de l'armée (O.R.A.) jusqu'au Comité du relais sacré.

Le 5 juillet 1957, à la Maison du Combattant, Alexis Thomas, Alexandre Sanguinetti, Maxime Blocq-Mascart prononcèrent des discours enflammés. Le lendemain, les visiteurs allaient saluer les harkis du bachagha Boualam, qui venaient de mettre fin aux agissements du déserteur Maillot.

Le 7 juillet, eut lieu la cérémonie 2.

1.  Le Comité d'entente et d'action à Alger était animé par quatre hommes : Mouchant, institu­teur et maire d'El-Biar, Claude Martin, Charles Comy et Auguste Arnould. Le C.E.A. avait été créé en 1955.

2.  Parmi les représentants des associations venues à Alger pour prêter ce serment solennel, on relevait les noms de : MM. Alexis Thomas, Sanguinetti, Le Marée, général Marias, capi­taine Gérard, général Touzet Du Vigier, général de Douhet, d'Harambure, colonel Guilhamat, Rollin, Crespin, Gignac, de Costier (O.R.A.), général Labadie, Blocq-Mascart...

Le colonel Bourgoin, un pied-noir de Cherchell, compagnon de la Libération, grand mutilé, lut avec émotion le serment :

« Unis par leur foi dans la grandeur et l'avenir de la France, dépositaires de l'honneur de la nation, fidèles au souvenir des Français de toutes origines, tombés pour la défense et la liberté de leur patrie commune, deux millions d'anciens combattants de la Métropole font par notre voix, en Algérie terre française, le serment de s'opposer par tous les moyens à toutes mesures qui menaceraient l'intégrité du territoire et l'Unité française. »

A la même heure, à Paris, sous l'Arc de Triomphe, au nom de leurs adhérents, les dirigeants d'associations d'anciens combattants le prononçaient à leur tour. Tous juraient de maintenir l'Algérie dans le sein de la France.

Qui pouvait douter de leur détermination de ne jamais se parjurer ?

Si j'insiste sur ce serment, c'est que la parole d'honneur est chose sacrée. Cet engagement solennel s'adressait non seulement aux Européens, mais aussi aux Musulmans pour lesquels, selon un de leurs proverbes, « si on reste maître du mot que l'on a gardé, on est esclave du mot prononcé ».

Le serment prenait une valeur d'autant plus grande que s'y étaient associés des mouvements très puissants de 1914-1918 et de 1939-1945 : deux cent mille affiliés à l'U.N.C., autant à la C.N.C., chiffres donnés par le colonel Bourgoin au cours de mon procès.

Qui a délié les anciens combattants de leur serment ?

On serait curieux de le savoir et je pense, en particulier, à Alexandre Sanguinetti qui deviendra bientôt un adversaire acharné de ceux qui, comme il avait été proclamé devant le Monument aux morts, s'opposeraient « par tous les moyens à toutes mesures qui menaceraient l'intégrité du territoire et l'Unité française ».

Accepter l'idée que notre drapeau ne flottât plus en Algérie, n'était-ce pas une grave menace, d'une part, pour l'intégrité du territoire et, d'autre part, pour l'unité française, car une révolte des Français d'Algérie était inéluctable, tandis que la Métropole se diviserait sur ce douloureux problème ?

Toutefois les politiques, trop souvent, ne semblent guère angoissés par leurs serments, même si leur apostasie doit engendrer des drames. On sait, avec Chateaubriand, que déjà se trouvaient à son époque des hommes qui, « après avoir prêté serment à la République une et indivisible, au Directoire en cinq personnes, au Consulat en trois, à l'Empire en une seule, à la première Restauration, avaient encore quelque chose à prêter à Louis-Philippe ».

De nos jours, il en sera de même, et les plus farouches adversaires de l'Algérie française seront souvent ceux qui, non seulement avaient juré de la défendre, mais encore incitaient nos compatriotes à la révolte.

N'est-il pas vrai, Michel Debré ?


G
énéral  JOUHAUD

 


 
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