MASSACRE D'UNE FAMILLE EN
ORANIE
Par Jean-Cllaude KESSLER
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Témoignage recueilli par Hervé
CUESTA dans le dernier numéro d'Aux Echos d'Alger
Depuis quelques jours une
espèce d'hystérie collective s'est emparée de la presse et de l'audiovisuel
mettant en cause le comportement de l'armée Française durant la guerre d'Algérie.
D'anciens soldats du contingent éprouvent aujourd'hui, disent-ils, un besoin
impérieux de parler.... de dénoncer Certaines dérives qu'aurait pu
commettre notre armée durant ce conflit. Aussi, j'ai décidé à mon tour de
parler, de raconter...
Tout ce qui va suivre est un témoignage destiné
aux générations présentes et à venir, afin de ne jamais oublier le martyre
qu’ont subit ces Français d'Algérie, véritable génocide que la France a
caché.
Je veux raconter...
Les toutes premières victimes innocentes, qui
au lendemain de la Toussaint sanglante, pour la plupart des femmes et des
enfants, étaient retrouvées affreusement mutilées, mais ceci n'allait être
que le prélude d'une extermination qui devait durer plus de sept ans.
Alors que je me trouvais avec mon unité en
Oranie, nous étions chargés d’assurer la protection de femmes isolées et
au cours de la journée nous passions les voir afin de les rassurer. Je me
souviens en particulier d'une famille de cultivateurs dont leur ferme n'était
qu'à une vingtaine de kilomètres de notre base, elle était composée du père,
de la mère et de quatre enfants dont l’aînée, une fillette de quatorze
ans et le dernier âgé seulement de quelques mois, ils avaient installé sur
le toit une sirène à air comprimé qu’ils devaient déclencher en cas
d’attaque. Je me souviens de cette nuit où le hurlement lugubre de la sirène
semblait nous dire : « dépêchez-vous » .
Je veux vous raconter ce que nous
avons retrouvé à notre arrivée :
La grange était en feu, dans la cour la
fillette était au sol, morte et entièrement dévêtue, après
l’avoir violée ils lui avaient tranche la tête et déposée
entre ses jambes nues. Mes hommes et moi étions pétrifiés, incapable de
bouger, le plus jeune du groupe a vomi et a refusé d’aller plus loin.
Nous nous sommes dirigés vers l’entrée de
la maison et là, dans la grande pièce qui servait de séjour, j'ai découvert
ce qu'on appelle l'horreur, le père était étendu près de la grande
table qui occupait le centre de cette pièce, son visage, les yeux grand
ouvert disaient encore sa souffrance et sa bouche entre-ouverte avait
vainement tenté de prendre un peu d'air quand ils l'ont égorgé, son
pantalon était rabattu sur ses chaussures.
Il était émasculé et il y avait du
sang partout sur le sol.
Sur la grande table gisait sa femme, la jupe
retroussée sur sa poitrine, une grande plaie allant du pubis jusqu'à la
taille et par où s’échappaient ses viscères qui pendaient le long de la
table.
Un peu plus loin sur le sol, une « bouillie
» sanguinolente qui de prime abord ne ressemblait à rien, était en fait les
deux garçons sur qui les terroristes s’étaient acharnés
probablement à coup de barre transformant leur tête en une espèce
de galette rouge dont la cervelle striait de blanc cette flaque.
Enfin je dois raconter aussi comment nous avons
découvert le quatrième enfant. Un bébé d’une quinzaine de mois,
comment décrire la scène tant cela est hideux, dans la cheminée éteinte
ils s’étaient servi du tournebroche pour empaler
l’enfant, le pique qui traversait son corps ressortait près du cou, sa tête
pendait et ses mains touchaient les cendres du foyer.
Il flottait dans la pièce une odeur fade, et
je sais à présent ce que l’on appelle l’odeur de la mort ; Les
corps étaient encore chauds preuve que le massacre venait d’avoir lieu, les
salopards ne devaient pas être bien loin.
Nous avons roulé les cadavres dans nos toiles
de tentes afin de les ramener à notre camp, et j’ai du personnellement
retirer le pique qui empalait le bébé car les hommes qui m’accompagnaient
ont refusé de toucher le petit corps meurtri et je ne voulais pas, par
respect pour cet enfant dont le seul crime avait été de naître européen,
que d’autres le voient.
Peut-on imaginer que des êtres humains
puissent commettre de tels actes au nom d’une quelconque idéologie sans
devenir eux-mêmes des animaux.
Jean-Claude KESSLER
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