LA VÉRITÉ
SUR LES ACCORDS D'ÉVIAN
par Jean-Paul
ANGELELLI |
MÉMOIRE
LA VOIX DU COMBATTANT N° 1673 MARS 2002
Algérie : janvier - septembre 1962
Nous avons demandé à Jean-Paul ANGELELLI
qui a
déjà rédigé plusieurs articles sur cette période, de nous raconter ce qui
s'est passé après le 19 mars.
(Recueilli pour les dossiers de Plaintes par H.Hervau)
---==oOo==---
VERS EVIAN
Au début de 1962, les événements s'accélèrent des deux
côtés de la Méditerranée. L'OAS passe à l'offensive.
A Paris, par des attentats visant le Parti Communiste. Mais
aussi et ceci contrairement aux ordres du général Salan par des
plasticages visant des personnalités. L'un va remuer l'opinion. Celui visant
le domicile d'André Malraux qui défigure une petit-fille. Le PC en profite
pour accuser le gouvernement de laxisme et organise une grande manifestation
de protestation dans ses fiefs de l'Est parisien le 8 février.
Harcelées par des commandos mobiles se repliant dans la
foule, les forces de l'ordre chargent les manifestants. Dix d'entre eux,
hommes et femmes, meurent étouffés contre les grilles (fermées) du, métro
Charonne. Leurs obsèques donneront lieu à des funérailles solennelles
orchestrées par le PC, suivies par une foule de plusieurs centaines de
milliers de personnes. Le PC n'alla pas plus loin ; il savait que De Gaulle
préparait la fin du conflit algérien. A Alger" l'OAS concentre son
action contre les mystérieuses barbouzes
envoyées de métropole pour la combattre. Des personnages douteux et des
demi-soldes du gaullisme en contact avec le délégué général Jean Morin
et avec des agents FLN pour transmission réciproque de renseignements,
communiqués à des policiers chevronnés et légaux (la mission C) cantonnés
et très protégés dans l'école de police d'Hussein dey (banlieue d'Alger). Les
barbouzes multiplieront attentats
provocateurs, enlèvements et tortures de militants OAS.
Leurs retraites seront attaquées par l'OAS et l'une d'elles, à l'hôtel
Radjah, sautera causant plusieurs victimes parmi les mercenaires : l'explosion
d'une caisse peut-être piégée par les services spéciaux français.
Finalement déconsidérées, mal vues, les
barbouzes seront rapatriées début
mars 62, sur ordre du ministre de l'Intérieur Roger Frey.
On les retrouvera dans certaines affaires troubles comme
les enlèvements d'Argoud et de Ben Barka.
Mais, à Alger, les contacts établis avec le FLN leur
survivront surtout après le 19 mars
où s'établira une véritable alliance
de fait entre les services anti-OAS (dont
la Sécurité Militaire) et des chefs nationalistes algériens infiltrés dans
Alger, à partir de Paris !
Quant à l'OAS elle-même, forte de la complicité (active
ou passive) d'éléments de la police et de l'Armée, soutenue par la majorité
de la population européenne, elle multiplie les coups spectaculaires à Alger
et à Oran où elle est aux ordres du général Jouhaud caché dans la
ville.
Mais elle connaît une crise interne, une purge dont seront
victimes les, deux dirigeants d'une organisation parallèle, le Front
nationaliste, Villard et Leroy, soupçonnés de contacts avec la
délégation générale d'Alger pour préparer une partition de l'Algérie.
C'est Jean-Jacques Susini et un soviet d'officiers qui auraient
décidé leur élimination, le général Salan étant mis devant
le fait accompli. Elle sera suivie d'autres règlements de comptes.
L'aggravation de la situation inquiète autant le gouvernement français que
le FLN. - C'est pourquoi, début février, des contacts clandestins sont
rétablis dans un village isolé de Haute-Savoie, les Rousses.
Informée ou sentant qu'un accord était sur le point
d'aboutir, le 23 février, des éléments de l'OAS, débordant le général Salan,
lancent un appel à une insurrection générale pour créer un climat
révolutionnaire dans les villes dont il faudra chasser les forces de l'ordre
fidèles au régime (CRS et gendarmes mobiles... ).. Dans les campagnes, des
maquis sont prévus. D'après un témoignage récent, Jean-Jacques Susini,
auquel le général Salan laissait les mains libres, envisageait - à
partir d'une position de force - de négocier avec un courant pro-occidental (essentiellement
Kabyle) existant dans le FLN et hostile aux éléments nationalistes
plus radicaux notamment de l'ALN extérieure (Tunisie et Maroc). Seul
l'accès à des archives réservées,
politiques et policières, permettront un jour -proche ou lointain- de savoir
ce qui s'est réellement passé dans cette période décisive et trouble.
LES ACCORDS D'EVIAN
Négociés laborieusement entre, du côté français, Louis
Joxe, Jean de Broglie et Robert Buron (qui, à la grande
colère du général De Gaulle, en livrera un compte-rendu dans un
livre en 1965) et des représentants du GPRA (Gouvernement Provisoire de la
République Algérienne) dont son vice-président Krim Belkacem, Yazid,
Ben Yahia et Redha Malek (qui a fourni son témoignage) les
accords sont signés le 18 mars. La fin des combats est annoncée,
officiellement, le 19 mars à midi. C'est le cessez-le-feu qui, on s'en
rendra vite compte, ne met pas fin à la guerre d'Algérie, le général De
Gaulle lui-même reconnaît, en 1964, que la guerre ne s'est terminée
que... le 3 juillet 62.
Ce n'est pas un traité d'état à état. La France ne
reconnaît pas le GPRA. Ils comportent 93 pages et 113 articles. Le Général
a ordonné à ses représentants de conclure
vite en distinguant «le possible de
l'impossible». Les Algériens ont été très méfiants. Connaissant sans
doute les réticences du CNRA (Conseil National de la Révolution Algérienne)
qui double le GPRA et peut s'appuyer sur l'Armée.
Les accords doivent être ratifiés par referendums.
Ce sera le cas, en France, le 8 avril, avec une
approbation massive et sans doute unique -jusque-là- de 90 % de OUI.
L'Algérie, elle, votera le 1- juillet, dans des
conditions très particulières et
ratifiera les accords à 99 %
! ... Jusqu'à cette date l'Algérie est confiée, sous protection française,
à un exécutif provisoire mixte (dans lequel les Algériens sont majoritaires)
présidé par un homme, A. Farès, homme d'affaires, pur produit de la
colonisation française d'avant 54 passé au FLN en 1956. Il aura à sa
disposition une force locale algérienne qui n'aura
jamais les moyens de garantir la paix et la sécurité, noyautée par le FLN.
Les accords sont un compromis. La France reconnaît (après
le 1er juillet) l'indépendance du nouvel État. Elle s'engage à poursuivre
sa politique financière et économique de coopération, admet
la liberté de circulation entre les deux pays, libère des milliers de
détenus (dont des dirigeants FLN comme Ben Bella, emprisonnés depuis
56) en France et en Algérie. Le FLN s'engage à rendre les prisonniers
français en sa possession. Estimés à environ 400,
ils ne seront que cinq
à retrouver la liberté !
De plus, la France conserve en Algérie des forces
militaires se montant à 80 000 hommes : la base de Mers El Kebir, ses sites
nucléaires et spatiaux au Sahara, pour une période limitée dans le temps :
la France peut continuer à exploiter
le pétrole saharien en le payant
en francs à l'Algérie.
Le FLN s'engage à garantir
les biens et les personnes des Français d'Algérie
mais refuse la double nationalité (ce que le gouvernement algérien actuel
reconnaît aux Algériens nés à l'étranger). Ces Français conserveront
leur nationalité ; mais devront définitivement choisit à l'issue d'une
période de trois ans. Des dispositions complexes dont une cour des garanties
les protègent en cas de menaces.
Le FLN aurait voulu séparer le statut des juifs d'Algérie
(français depuis le décret Crémieux en 1870) du reste de la
communauté française. Les autorités françaises ne l'ont pas accepté. Sans
que l'on s'en soit rendu compte, les
Algériens, musulmans de souche, sont écartés de la nationalité française.
Ils peuvent évidemment la conserver mais en France et en demandant leur
réintégration.
Tout s'est passé comme si, désormais, TOUS les Algériens
de souche (les Français de souche nord-africaine dans le vocabulaire
officiel) devenaient nationaux algériens. Le FLN s'étant engagé à
respecter une amnistie pour tous les actes commis avant mars 62, quelque qu'en
soient les auteurs, le gouvernement français s'est contenté d'une vague
promesse sans prendre les précautions nécessaires. Ce n'est pas le seul pari
d'Evian. Il postulait aussi le maintien, sur place, d'une forte communauté
européenne. Tels qu'ils sont, ces accords sont présentés comme la fin des
combats et le retour de la paix en Algérie.
De Gaulle a voulu avant tout libérer
la France du boulet algérien ou, comme il le disait, de «la
boite à chagrins». Et l'opinion
française le suivra (cf. le referendum. ratifié de l'extrême gauche à la
droite ; seule l'extrême droite et des individualités voteront contre).
Mais, avant la fin juin, le CNRA désavouera le GPRA et dénoncera
dans les accords «une plate-forme néo-coloniale» en exigeant la «récupération
des richesses nationales».
LES DERNIERS COMBATS DE L'OAS
L'OAS n'a pu empêcher la signature des accords d'Evian.
Elle portera désormais tous ses efforts pour les saboter. D'où un
affrontement inévitable avec les forces de l'ordre classiques ; mais aussi
avec le contingent qui leur est associé. C'est ce qui se produit le 22 mars,
à Alger, dans le quartier populaire de Bab El Oued (l'un de ses bastions) où
un accrochage meurtrier cause la mort de plusieurs appelés. Le quartier est
encerclé, soumis à un blocus et attaqué avec -des moyens massifs (blindés
et aviation) qui n'ont jamais été
utilisés contre les réduits urbains FLN.
Puis, il est fouillé brutalement.
Pour affirmer sa solidarité avec le quartier meurtri, une
manifestation est organisée le 26 mars par l'un des responsables OAS le
colonel Vaudrey. Une foule importante mais pacifique se heurte, rue
d'Isly, en début d'après-midi, à un barrage de soldats
musulmans appartenant au 41
Régiment de Tirailleurs, peu préparés aux opérations de maintien de
l'ordre, apeurés et fatigués. Ils ouvrent le feu à bout portant. Bilan : 80
morts en comptant les blessés (il y
en eut des centaines),
qui décèdent par la suite.
Le dossier du 26 mars reste très controversé. Les autorités officielles
évoqueront des coups de feu tirés (d'un immeuble ?) contre les soldats.
L'enquête d'alors est encore confidentielle aujourd'hui. Et,
dans les archives, il n'a pas été
trouvé l'ordre envoyant les Tirailleurs sur le terrain.
Au-delà des interrogations (provocation de l'OAS ou
fusillade délibérée ?) la principale conséquence fut de convaincre la
population européenne, dans toute l'Algérie, que l'Armée ne basculerait pas
et n'hésiterait pas à tirer le cas
échéant. C'est là un élément
non négligeable pour expliquer les départs massifs dans les mois suivants.
L'OAS essuie un autre échec en voulant implanter des maquis dans le bled.
Lieu choisi : l'Ouarsenis où l'OAS espérait compter sur le soutien du bachaga
Boualem et de ses harkas. Jugeant l'entreprise hasardée, Boualem restera
attentiste et les commandos OAS seront coincés entre le FLN et les forces de
l'ordre. Un officier d'active qui avait rejoint l'OAS, le commandant Bazin,
y trouvera la mort et l'OAS y perdra aussi de précieux cadres urbains.
Autres coups durs, une série d'arrestations au sommet
décapite l'Organisation. D'abord à Oran, pourtant dominée par les forces
rebelles, le général Jouhaud est arrêté le 26 mars. A Alger, le 17
avril, c'est au tour du chef des Delta (le fer de lance de l'OAS) le
lieutenant Degueldre. Enfin, toujours à Alger, le 20 avril, le chef
suprême le général Salan (Soleil) est arrêté dans son PC du centre
ville à la suite d'une opération montée de France par la Sécurité
Militaire.
Les procès des généraux Jouhaud (le 13 avril) et Salan
(le 24 mai) devant la Cour Militaire de Justice suivront Jouhaud est
condamné à mort mais Salan bénéficie de circonstances atténuantes.,
La défense a su, profitant des drames qui secouent l'Algérie, plaider en
faveur du général., Ulcéré, le chef de l'Etat ordonne
l'exécution de Jouhaud. Il doit y renoncer devant la menace de
démission du Premier ministre Georges Pompidou (il a remplacé Michel
Debré démissionné après les accords d'Evian) et d'autres ministres.
Détenus à Tulle, les deux hommes ont été parmi les
derniers libérés. Jouhaud en 1967, Salan en juin 68. Ils
retrouveront (avec bien d'autres) leurs grades et décorations après
l'amnistie totale de .1982 imposée par le président Mitterrand aux
députés socialistes.
Un nouveau tribunal, la Cour Militaire de Justice
condamnera à mort d'autres accusés. Trois seront exécutés : en juin
62, Piegst et
Dovecar
; le lieutenant Delguedre,
figure emblématique de l'OAS, le sera le 6 juillet 62. Sur le terrain,
l'Organisation même affaiblie pratiquera une autre stratégie. Profitant de
la partition de fait, conséquences des attentats systématiques contre les
musulmans (le plus meurtrier fut une voiture piégée sur le port d'Alger)
entre quartiers urbains, des éléments OAS harcèleront les zones musulmanes
espérant que leurs populations exaspérées et poussées dans la rue
affronteront brutalement, les forces de l'ordre débordées. Ce qui ne sera
pas. Au contraire, il y aura collaboration
entre loyalistes et cadres, -FLN pour combattre l'OAS. Et le pouvoir put monter
en épingle, dans
les média,
les atrocités de l'OAS, censurant que leur bilan n'était pas
comparable, en nombre de morts, à celui du FLN depuis 1954. Et, à Oran où
les combats furent intenses comme à Alger, le pouvoir n'hésitera pas à ordonner
la rafle et l'envoi (forcé) en
France des jeunes Européens suspects de constituer les troupes de choc
du mouvement subversif. On peut déplorer voire condamner ces ultimes combats
à condition de comprendre qu'ils furent surtout, comme l'a dit Yves
Courtière, «les feux du désespoir»
LES ACCORDS SUSINI - MOSTEFAI
Plus l'échéance de juillet approche, plus l'OAS,
décapitée et éclatée en groupes rivaux et régionaux (plus forte à
Oran qu'à Alger), en grande partie privée de soutiens suite à l'exode des
Européens, se montre, incapable d'enrayer le processus initié par les
accords d'Evian.
Or, le 17 juin, coup de théâtre. On apprend
qu'après bien des péripéties, une rencontre et des accords ont été
signés entre Jean-Jacques Susini -qui restait l'un des leaders
charismatiques de l’OAS- et le docteur Mostefai représentant le FLN.
L'OAS arrêtait ses attentats et sa politique de terre brûlée (qui pouvait
s'étendre jusqu'aux sabotages des puits de pétrole) et décidait une trêve.
Quant au FLN, il promettait des garanties supplémentaires aux Européens
d'Algérie. Allant même, à ce qu'il a été dit, jusqu'à constituer une
armée avec des commandos OAS et des éléments de la force locale. Farès
avait cautionné cette entente ainsi que plusieurs autres personnalités
libérales comme l'ancien maire d'Alger, Jacques Chevallier favorable
à l'indépendance.
Un certain flou demeure sur les dessous de cette
négociation secrète. Elle a valu et vaut encore à Susini de
virulentes attaques de responsables OAS l'accusant de trahison.
Il s'en est expliqué et, un jour, certaines
archives à ce sujet seront
publiées.
Pour, Susini qui sait que sur Alger les forces sur
lesquelles il compte sont réduites, il s'agit d'un véritable renversement
d'alliance. Le FLN, à Tunis, est en pleine crise. Le GPRA (dont fait partie Krim
Belkacem patron de la wilaya 3 -la wilaya kabyle- hostile à Ben Bella
et à Boumedienne) voit arriver une épreuve de force d'après
l'indépendance. Il accepterait les accords surtout si l'ALN reste cantonnée
à l'extérieur. D'après Susini, le haut-commissaire de France en
Algérie, Christian Fouchet, aurait mis au courant le gouvernement
français à qui il était demandé de ne pas ouvrir les frontières après le
1 juillet. Le gouvernement français aurait refusé. Pour Susini
qui prit des risques en restant en Algérie jusqu'en juillet, cette entente
eut des côtés positifs : une certaine détente dans l'Algérois et le
départ des derniers commandos Delta d'Alger et d'Oran. De plus, consultés,
les généraux Jouhaud et Salan avaient cautionné la fin des
combats.
Aujourd'hui minimisés ou caricaturés, ces accords
inquiétèrent beaucoup à Tunis (voir le livre de Redha Malek). Ils ne
pouvaient qu'échouer vu le rapport des forces à la veille de l'indépendance.
LES CRIMES DU FLN
Il faut maintenant évoquer des faits qui se sont
déroulés de mars à fin juin en Algérie et dont la responsabilité incombe
au FLN. Alors, que les médias de l'époque, surtout la presse (avec des
exceptions comme l'Aurore, le Figaro, les hebdomadaires de la
presse de droite : Aux Ecoutes, la Nation Française, Rivarol,
Aspects de la France), concentraient leurs attaques et critiques contre
l'OAS.
Ils sont de deux sortes : les enlèvements et les débuts
des massacres des supplétifs algériens amalgamés sous le terme de harkis.
Les enlèvements dont les victimes ont disparu, souvent à
jamais, commencent dès le 17 avril
dans certains quartiers périphériques d'Alger, d'Oran et dans le bled où
des groupes FLN établissent des barrages au hasard des routes. Pour le FLN,
il s'agit d'une riposte aux attentats OAS. Même
dans des régions où l'OAS n'existait pas.
De plus, les disparus sont non seulement des hommes
actifs mais des femmes, des vieillards, des enfants.
Le phénomène n'est pas marginal : 3
000 cas recensés jusqu'en juillet
62 (ce, pour un million d'Européens, ce qui aurait donné 150
000 personnes disparues pour une
population métropolitaine de 50 millions d'habitants). Des bruits ont
aussitôt circulé sur le sort affreux des disparus (es) : torturés,
exécutés' les femmes violées, livrées à des voyous -, ce qui s'est
révélé exact.
Sauf exceptions, les forces françaises qui ont su souvent
où étaient parqués (provisoirement) les disparus ne sont pas intervenues.
La stratégie du FLN est habile. Il ne rompt pas le
cessez-le-feu. Il pratique un «terrorisme
silencieux» (Jean Monneret)
dont le résultat essentiel est de propager la panique chez les civils
européens d'Algérie et de précipiter leur exode. Sans doute aussi,
incapable de contrôler ceux qui agissent en son nom, a-t-il lâché la bride
à des éléments incontrôlés avides de vengeances et de pillages.
Il se produira la même pratique contre des musulmans ;
mais les chiffres précis nous manquent. D'autres disparus encore, après le
1- juillet (dont des soldats de l'Armée française). A la fin de l'été 62,
le gouvernement français se décidera à faire pression sur les autorités
algériennes (Ben Bella et Boumedienne) pour obtenir des renseignements.
Il y aura même des libérations. Mais peu des victimes d'avant juillet 62.
La Croix Rouge enquêtera dans certains camps du sud algérien où des captifs
sont retenus. Son rapport ne fut
pas rendu public. En 1987, encore,
il a été fait mention d'endroits où des Européens étaient maintenus en
Algérie., Il s'agit certainement d'une désinformation.
Soumis aux questions de sénateurs en 1964, Jean de
Broglie, ex-secrétaire d'Etat aux Affaires Algériennes, fit le point sur
cette triste et macabre affaire. Il y aurait eu 1773 disparus
définitifs dont quelques CENTAINES
de morts assurés.
Des familles portent encore le deuil d'êtres chers qui ne
survivent que dans leurs mémoires meurtries.
L'autre drame sur lequel désormais des ouvrages
incontestables ont été publiés est celui des harkis.
Au conseil des ministres du 21 février 62 De Gaulle
avait assuré la secrétaire d'État d'origine algérienne, Nefissa Sid
Cara (décédée au début de cette année) que, convaincue de l'adhésion
de «la majorité des Musulmans à l'indépendance», la France tiendrait
compte des «exceptions dont nous avons le devoir de nous préoccuper
aujourd'hui... et demain».
Ces exceptions ne concernaient pas moins de 160
000 hommes sous l'uniforme français.
Si l'on met de côté les engagés qui pour la plupart rejoindront la
métropole (comme le général Raffa qui avait refusé de prendre la
tête de la force locale), les appelés qui seront libérés et se fondront
dans la population, il reste quelques 70 000 supplétifs aux statuts divers (harkis,
moghzanis, groupes d'autodéfense, etc) très compromis à nos côtés dans de
durs combats.
A Evian, le FLN
s'était engagé à ne pas se livrer
à des représailles. Le gouvernement français a-t-il cru sincèrement
à cette promesse qui n'était pas
cautionnée publiquement
par l'ALN intérieure et extérieure ? Apparemment... Mais, comme il a été
dit à Evian, les Algériens de statut coranique sont privés de la
nationalité française. A moins qu'ils ne demandent leur réintégration,
mais en France. Encore faut-il s'y rendre... On leur proposa soit de s'engager
dans l'Armée (en laissant leurs, familles sur place) ou dans la force locale
(noyautée par le FLN) soit d'être démobilisés avec un pécule et
peut-être, mais après une sélection, d'être reclassés en métropole.
Et, d'abord, ils étaient désarmés (souvent dans des
conditions ignominieuses) et renvoyés chez eux. Sans protection.
Dans un premier temps, le FLN se montra modéré.
Garantissant son pardon à ceux qui lui reverseraient leur pécule ; mais, secrètement,
des instructions parties des états-majors de l'ALN extérieure
(elles furent captées par les services français)
conseillaient aux groupes armés d'attendre l'indépendance
pour s'en prendre aux traîtres.
Et, dès avril, se produisent des incidents meurtriers -,
les vengeurs étant renforcés par les marsiens, ces résistants de la
dernière heure, désireux de donner des gages. Et d'autant plus libres d'agir
que le dispositif militaire français
se rétracte. Un exemple: le
célèbre commando Georges à Saïda, unité d'élite, composé de
fellaghas ralliés, est exterminé
dans des conditions atroces, excepté ceux qui ont pu gagner la France grâce
à une initiative privée.
Très vite, les responsables militaires seront au courant
de ces exactions et égorgements.
Certains
prendront l'initiative de regrouper leurs hommes et leurs familles pour les
envoyer en métropole.
Si le ministre des Armées Pierre Messmer, à ce
qu'il assure, a souvent fermé les yeux sur ces conduites, Louis Joxe et
le colonel Buis, chef de cabinet de Fouchet à Rocher Noir ont
la lourde responsabilité d'avoir signé des circulaires condamnant
sous peine de sanctions ces initiatives isolées et ordonnant même le «renvoi
des supplétifs débarqués en métropole».
La cause de ces meurtriers ukases comme en témoignent les compte-rendus de
certains conseils ministériels révélés par Alain Peyrefitte : ( ...
) ces hommes -De Gaulle les nomme des réfugiés et non des rapatriés
servent de troupes de choc à l'OAS, De plus, on ne peut tous les accepter.
Début 63, de nouveau, De Gaulle exprimera sa crainte d'«une
invasion de la main d'oeuvre algérienne»_
.. «qu'elle se fasse ou non passer pour des harkis".
Un temps précieux sera perdu qui aurait permis de sauver
les menacés. Evidemment, après
l'indépendance, les massacres auront
lieu ouvertement. Les autorités
militaires françaises accepteront d'abriter dans leurs casernes ceux qui
peuvent s'y réfugier mais dans des «cas
exceptionnels». Et en évitant
absolument des incidents qui pourraient conduire à «recommencer la guerre».
Ce drame collectif sera peu
répercuté en métropole, sauf dans
la presse ex-Algérie Française. En novembre, Le Monde y fera une rapide
allusion dans un article signé Jean
Lacouture qui donne le chiffre de 10 000 harkis tués (souvent dans
des conditions épouvantables) et 10 000 autres,- familles incluses arrivés
en métropole en 1962. Ils seront regroupés dans des camps isolés
pour les mettre à l'abri des militants de la Fédération de France du FLN
qui est réapparu, au grand jour, après le 19 mars. 40 000 autres
ont pu gagner la France, entre 63 et 65 : rescapés de liquidations
systématiques dans certaines régions, atténuées dans d'autres par des
solidarités familiales ou tribales.
Peut-on cependant parler de génocide ? Et quel fut le
bilan exact étant donné qu'il ne faut pas compter sur les autorités
algériennes pour le donner... Le chiffre très médiatique de 150 000 morts
ne résiste pas à la critique historique si on le compare à tous les morts
de la guerre d'Algérie (200 à 250. 000) voire à ceux (100 à 150 000) de
l'actuel conflit anti-islamiste; Après une étude serrée, le général Faivre
conclut sur une estimation de 60 à 80 000 victimes ; ce qui est
énorme pour une population algérienne (en 1962) de dix millions d'habitants.
Comparé à l'épuration de 44-45, en France : cela correspondrait à presque 400
000 morts. Les dirigeants
algériens soit nient ce drame soit le minimisent et même le justifient en
traitant les harkis de collabos comme l'a fait le président Bouteflika
lors de son récent séjour en France. Dans les rangs islamistes, on
dénonce même des fils de harkis. Les harkis sont en effet le démenti
flagrant au mythe, entretenu par le FLN, d'un peuple algérien unanime contre
le colonialisme. En France, il a fallu attendre le 25
septembre 2001 pour que le
président de la République, Jacques Chirac, leur rende l'hommage qui
leur était dû. Une tardive réparation «pour une Saint Barthélemy
qui pouvait être ÉVITÉE»
(Mohand Hamoumou).
Il faut aussi parler d'un autre drame, celui-ci moins connu
: c'est celui des messalistes. Ces nationalistes algériens, frères
ennemis du FLN, dont le rôle a été minimisé après 54. Ils furent à nos
côtés, en France comme en Algérie. Manipulés
par les services policiers et militaires français,
puis abandonnés. Leur chef, Messali,
père fondateur du nationalisme algérien, exilé en France avant .54, fut
inhumé en Algérie après sa mort. Bouteflika le réintégrant dans la
mémoire algérienne. Mais, des deux côtés de la Méditerranée, ses
fidèles ont payé pour lui...
L'EXODE...
Tandis que tous ces événements se déroulent, dès le
mois d'avril et plus massivement en mai et juin, les Européens d'Algérie ont
afflué en nombre vers les ports et les aéroports, pour fuir... A la grande
surprise des autorités qui s'attendaient bien à un certain nombre de
départs (il en avait été prévu 400 000 sur quatre ans !). Elles seront,
très vite, débordées. Pourquoi cet exode dont la télévision montrera, à
l'occasion, des images pénibles et douloureuses :
des familles entières entassées des heures sous le soleil et surveillées
avant de bénéficier de moyens de transport insuffisants ? Il y aura même,
en juin, une grève maritime lancée par la CGT.
L'explication officielle en rend l'OAS responsable, alors
que l'OAS; avait jusque-là essayé d'empêcher ces départs qui la privait de
son vivier. En réalité, les Européens savent ce qui se passe dans le pays,
craignent des représailles ou une guerre civile après l'indépendance (ce
qui sera) et n'ont aucune confiance
dans les garanties d'Evian. Ils
pensent dans leur immense majorité qu'ils
ont été sacrifiés par le général De Gaulle qu'ils haissent.
Il y a un abîme d'incompréhension de chaque côté de la
Médîterranée. On sait aussi maintenant que certains clans du FLN ne
voulaient pas du maintien d'une forte communauté européenne en Algérie.
Incarnant le colonialisme et ayant des connaissances et des amitiés chez les
Musulmans. Ils auraient su beaucoup
trop de choses.
Grâce à Alain Peyrefitte (C'était De Gaulle)
les propos tenus au Conseil des Ministres dans les mois dramatiques (de mars
à l'été 62) nous sont connus : ils
sont attristants. L'exode est
d'abord obstinément nié. Ce sont des vacanciers qui ont
anticipé leurs voyages en France, affirme Robert Boulin secrétaire
d'Etat aux rapatriés (De Gaulle dit plus justement les
repliés). Ils
repartiront à la fin de l'été...
Pour Louis Joxe, il faut les contrôler car ils sont certainement
manipulés par l'OAS. Quand il commence à se confirmer que le flux est
irréversible il est décidé, d'empêcher
les arrivants de se regrouper -surtout
dans le Midi- de menacer les fonctionnaires de sanctions s'ils ne veulent pas
retourner en Algérie. Le Premier ministre, sans doute mieux informé que ses
collègues, demandera même ironiquement s'il s'agit de rapatriés
ou de déportés.
Au moins jusqu'à l'été 62, les mesures d'accueil,
notamment, à Marseille, furent très insuffisantes.
Sauf sur le plan policier. Des
initiatives plus privées que publiques essayèrent difficilement de pallier
à la situation. Plus tard, De Gaulle, ulcéré par ces retours qui
sapaient sa politique, se laissa aller, devant Peyrefitte, à des
attaques violentes contre les pieds noirs
(il disait les
colons)
«responsables de leurs, malheurs».
En 1964,. il aura des paroles plus humaines, encore qu'il ait affirmé que la décolonisation
algérienne s'était faite
dans de bonnes conditions «en
une année, un million de Français établis dans ce pays ont été rapatriés
sans heurt, sans drame et sans douleur et intégrés dans notre unité
nationale» (6 juin 64). Il y a à dire sur cette intégration qui
aurait été plus facile s'.il y avait eu -en même temps et la facilitant-
l'indemnisation des biens perdus. Jusqu'à ce qu'elle soit enfin votée sous
le septennat de Giscard d'Estaing, elle fut constamment retardée sous divers
prétextes. Jusqu'au départ de De Gaulle, il n'y aura pas de
réconciliation entre lui et la communauté rapatriée, dont 1962 marque la
fin d'une histoire à la fois,, difficile, glorieuse et amère.
Les témoins encore restants et leurs descendants luttent, quarante ans
après, pour défendre, un -passé calomnié ou caricaturé. A
noter que, fin 62, il y a en Algérie 120 à 150 000 nationaux français. Des
pieds noirs qui espèrent rester et des coopérants, souvent de gauche
ou d'extrême gauche (les pieds rouges) qui croient dans l'Algérie
révolutionnaire. Leur nombre va diminuer rapidement. Les premier seront
chassés par la politique Ben Belliste de tracasseries, confiscations
et nationalisations. Les autres seront victimes de l'ostracisme du FLN qui se
méfie (même ceux -comme Hervé Bourges- qui avaient pris la nationalité
algérienne).
L'ALGÉRIE APRÈS L’INDÉPENDANCE
Il faut en dire un mot. Elle commence officiellement le 3
juillet après le referendum du 1er juillet (aux
résultats staliniens) et l'Algérie
indépendante célébrera désormais sa Fête nationale le 5 juillet: une
référence historique. C'est le 5 juillet 1830 que le corps expéditionnaire
français entrait dans Alger : le premier acte de la conquête.
Une marée verte et blanche submergea l'Algérie dont on ne
peut contester la sincérité. Même si les manifestations étaient encadrées
et orchestrées par le FLN. La paix est revenue. Le GPRA de Ben Kheda
et Krim Belkacem s'installe à Alger. Mais, il a été désavoué par
le CNRA. Les troupes de l'ALN extérieure -commandées par le colonel Boumedienne
dont certains adjoints sont des officiers algériens déserteurs souvent
tardifs de l'Armée française pénètrent en Algérie par l'Est et l'Ouest.
C'est une armée disciplinée et professionnelle, équipée
par les Soviétiques. Les Européens
restés sur place sont rassurés. Pas longtemps. A Oran, le 5 juillet -où
les attentats OAS ont cessé après le départ des derniers commandos Delta et
où les forces françaises sont sous les ordres du général Katz se
produit en fin de matinée et une partie de l'après-midi un véritable
pogrom.
Suite à un incident -réel ou provoqué ?- (un coup de feu
isolé ?) une foule algérienne surexcitée, menée par des groupes FLN armés
se rue sur les Européens au hasard
des rues : des scènes de
lynchage, des égorgements, des rafles d'hommes et femmes emmenés en camions
et pour la plupart définitivement disparus. Exécutés et enfouis dans des
charniers autour du petit lac d'Oran.
Le bilan des disparus non retrouvés est controversé :
3 000 pour les uns, 5 à 800 enregistrés d'après
certaines
archives.
Les tueries ont eu lieu en toute impunité.
Le général Katz, alerté dès les débuts des événements, n'interviendra
que très tard.
Accusé d'avoir laissé faire, parce qu'il détestait
la population oranaise, il excipera
que le maintien de l'ordre dépendait des autorités algériennes et qu'il
a attendu les ordres supérieurs pour
éviter un accrochage avec les Algériens. Il portera, des années après,
l'opprobre de son attentisme, de la part des pieds noirs rescapés et aussi
d'une grande partie de ses collègues militaires qui le boycotteront dans les
cérémonies officielles.
Le dossier du 5 juillet se complique avec l'attitude du FLN
et de l'ALN qui mettent le carnage sur le compte de voyous sévèrement
réprimés les jours suivants (arrestations et fusillades). Toutefois, tous
les renseignements recueillis
par des recherches privées attestent
que le 5 juillet ne fut pas spontané mais préparé.
S'agissait-il pour certains éléments ultra du FLN et de
l'ALN, arrivés et installés à Tlemcen, de donner une leçon aux Oranais
européens et d'accélérer leur départ ? Tout s'est passé comme si...
D'ailleurs dans les jours et mois qui suivent, c'est
l'anarchie qui s'installe en Algérie, aggravée par une guerre civile. Le
GPRA entre en conflit avec Ben Bella et Boumedienne. Mais les
troupes très réduites des combattants intérieurs ne font pas le poids face
à l'ex-armée des frontières. La population algérienne descendra dans la
rue aux cris de baraket (ça suffit).
Pendant ce temps, les
enlèvements -y compris de soldats
français- continuent ainsi que les brimades et réquisitions. Ambassadeur de
France à Alger, Jean-Marcel Jeanneney, minimise le chaos mais reconnaît
son impuissance à l'enrayer. Des avertissements sont adressés aux
responsables algériens ; mais, en vain. Et
contre les harkis ce sont des jours et des nuits des longs couteaux.
A la fin de l'été, c'est Ben Bella (chef
charismatique fabriqué puisque capturé et emprisonné par la France
depuis 1956) qui l'emporte en faisant élire, sur une liste du FLN (parti
unique), une Assemblée nationale Constituante. Née le 25 septembre, la «République
algérienne, démocratique et populaire» est une dictature., La seule
force organisée et solide n'est plus un FLN ectoplasmique mais l'Armée qui
tient encore le pouvoir et combat brutalement depuis des années le terrorisme
islamiste.
La politique «socialiste de Ben Bella entouré d'Européens
d'extrême gauche mais se réclamant
de l'arabisme» (les kabyles se révolteront mais divisés et trop tard) et de
l'Islam ruinera l'économie du pays. A noter que, profitant de la
pagaille, plusieurs centaines de milliers d'Algériens (5 à 600 000 entre
62 et 65) afflueront en France).
A la grande colère de De Gaulle qui a maintenu les
accords d'Evian sans illusion ; mais parce qu'il en a besoin
pour le pétrole et surtout les
essais nucléaires. Il a aussi continué à
verser une aide financière non
négligeable (260 milliards anciens entre 62 et 65) qui ont évité
l'effondrement complet du pays.
Quant à la France et à l'opinion française, elle a
semble-t-il bien digéré la fin de l'Algérie française. Il est vrai
qu'officiellement tout a été fait pour qu'elle ne s'alarme pas des drames
engendrés.
Les pieds noirs restent suspects. Pendant l'été 62, une
campagne se déchaîne accusant des
rescapés OAS d'être responsables de braquages et de banditisme. Et puis
l'été, ce sont les vacances, dans un pays qui entre dans une certaine
prospérité (les Trente Glorieuses).
Mais il y a des irréductibles. Le 22 août, De Gaulle
et son épouse ayant quitté l'Élysée par la route échappent à une
embuscade à la sortie de Paris au lieu dit Le Petit Clamart.
Le commando activiste armé qui les attendait est arrêté
en septembre. Leur chef un jeune lieutenant-colonel spécialisé dans
l'aéronautique, polytechnicien, Jean Bastien -Thiry qui, jugé à
Vincennes début 63 par la Cour Militaire de Justice, revendiquera
son action (encore qu'il ait affirmé qu'il s'agissait d'enlever le
Général pour le juger) qu'il présente comme une punition pour les drames et
malheurs des Européens et Musulmans d'Algérie sacrifiés par la politique
gaulliste. Il mettra aussi en cause la légitimité du pouvoir.
Condamné à mort après des audiences tumultueuses, il
sera fusillé le 11 mars 1963 au fort d'Ivry. Le Général aurait refusé
sa grâce parce que si le commando avait réussi, son épouse, à ses côtés
dans là voiture, aurait été tuée. Mais il aurait dit de Bastien-Thiry,
«celui-là, ils pourront en faire
un héros. Il le mérite».
Sur, le plan politique, De Gaulle profitera de
l'émotion suscitée par l'attentat qui aurait pu causer un vide au sommet de
l'Etat en proposant, par le référendum du 28 octobre 62, une
modification essentielle de la Constitution, toujours valable : l'élection
du président de la République au suffrage universel.
Le drame algérien a donc été à l'origine et de la
naissance de la Ve République et d'une mutation fondamentale du régime.
Mais la guerre d'Algérie, quarante ans après, est loin
d'être l'objet d'une mémoire froide.
Jean-Paul Angelelli
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