Harkis,
le temps de la réparation
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Ils
étaient les gêneurs d'une histoire que De Gaulle voulait absolument boucler.
Donc ils disparurent au printemps 1962. On les oublia d'abord au moment des
accords d'Evian; comme les Pieds noirs, ils ne furent même pas représentés. Puis
ils disparurent, au sens le plus sanguinaire. Au début de l'été 1962, dès les
premiers jours de l'indépendance algérienne, ces musulmans qui avaient choisi la
France furent massacrés collectivement par les troupes du FLN et les «marsiens»,
ces fellaghas de la dernière heure. Dans toutes les villes et toutes les
bourgades de l'Algérie nouvelle, ce fut atroce.
Des rivières de sang. Une population assassinée en quelques semaines. Les
historiens se disputent aujourd'hui sur l'étendue de cette monstruosité négligée
par l'Histoire. Les chiffres sont effrayants: de 30 000 à 150 000 Harkis et
leurs familles furent alors assassinés par les nationalistes algériens. Pire, ce
fut avec la complicité de la France, ce que viennent rappeler neuf Harkis qui
ont déposé plainte pour crime contre l'humanité devant le tribunal de Grande
instance de Paris. La complicité. Le laisser faire. Les directives gaullistes...
Tant d’officiers, d’appelés ou de Pieds-noirs restés après l'indépendance, s'en
souviennent et cauchemardent depuis quarante ans. Certains parlent enfin.
La
hiérarchie militaire française avait reçu l'ordre du gouvernement d'alors -la
fameuse
«directive Joxe»
- de désarmer les
harkis, et de ne plus s'intéresser à leur sort. Les Français abandonnèrent les
harkis à la horde meurtrière qui déboulait. On égorgeait près des garnisons
françaises, et les Français avaient reçu l'ordre de ne pas bouger, de ne rien
faire pour aider ceux qui avaient été leurs anciens lieutenants ou leurs anciens
commis. Des dizaines de milliers de harkis furent égorgés, sous les yeux ou à
portée de voix de l'armée française, restée là pour assurer, parait-il, la
«réussite»
des accords d'Evian...
L'histoire de cette Saint-Barthélemy algérienne n'était pas inconnue. Il aura
pourtant fallu quarante ans pour qu'enfin elle soit dite, découverte par le plus
grand nombre, et bientôt assumée -oh timidement - par la République qui, le 23
septembre prochain, instaurera une journée commémorative aux Harkis... Quarante
ans... Trois générations perdues, brisées, désespérées... Des centaines de
milliers de Français d'origine harkie parqués durant des décennies dans des
cantonnements indignes... Une fraction de la France niée -ni Algériens ni tout à
fait Français...
D'où
vient donc l'amnésie d'une nation entière, cette ingratitude révoltante de la
France de Valmy à ses fils, cette criminelle décision des ministres gaullistes
qui, sous les lambris de leurs palais parisiens, d'un trait de plume
administratif, cosignèrent l'arrêt de mort de ces milliers d'hommes qui avaient
choisi la France..? Les harkis ont droit aujourd'hui au rétablissement de leur
honneur, à la réparation de la Nation.
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