DOSSIER
: Algérie 1962-2002
Valeurs Actuelles n°
3423 paru le 5 Juillet 2002
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“Ce que dit la loi”
D'après Me Emmanuel Altit :
Avocat des familles de “Français d’Algérie” qui
portent plainte contre X auprès du tribunal de grande instance de Paris, pour
“crimes contre l’humanité et complicité, génocide et complicité,
enlèvement, séquestration, détention arbitraire”, Me
Emmanuel Altit explique les enjeux de cette démarche.
Que peuvent les familles face aux lois d’amnistie ?
Ces lois sont en contradiction avec les standards de droit international
qui ont une valeur juridique supérieure, tels que ceux qui instituent l’imprescriptibilité
pour les crimes contre l’humanité et le génocide. Interdisant aux citoyens
de faire valoir leur droit à la justice et d’obtenir réparation, ces lois
remettent en question le rôle même de la justice, qui est de distinguer
entre victimes et coupables.
La plainte pour crime contre l’humanité et génocide est-elle vraiment
recevable ?
Cette incrimination n’a été incluse dans le code pénal français qu’en
1994, ce qui permet à la Cour de cassation de considérer que tout crime de
masse commis avant cette date ne peut être poursuivi au titre de crime contre
l’humanité, à l’exception de ceux commis pendant la Seconde Guerre
mondiale, pour lesquels des dispositions concernant le tribunal de Nuremberg
ont été incluses, dès 1945, en droit positif français (jurisprudence Boudarel,
1993). Le crime contre l’humanité étant imprescriptible, les lois d’amnistie
ne devraient donc pas logiquement s’appliquer à cette infraction.
Il semble contradictoire d’autre part de considérer, comme le fait la Cour
de cassation, que la notion de crime contre l’humanité ne peut s’appliquer
à des actes commis avant 1994, alors que ce concept a été élaboré sur des
notions préexistantes, reposant sur les plus graves atteintes au droit. De
plus la France est partie à la convention de l’Onu (1948) relative au crime
de génocide.
F. Pons et E. Bauquis
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