Vu, les articles 17 a 19 et
75 du Code de Procédure pénale, rapportons les opérations suivantes que
nous avons effectuées, agissant en uniforme et conformément aux ordres de
nos Chefs :
PREAMBULE
Le quatre Mai Mil neuf cent
soixante deux, à seize heures, s'est présenté à notre brigade un officier
du 1/27ème Régiment d'Artillerie, conduisant un individu F.S.N.A. qu'il
avait appréhendé au cours d'un contrôle "Patrouille Mobile" vers
10 heures, alors que ce dernier effectuait des contrôles et fouilles de
véhicules civils circulant avenue de Sidi-Chami à Oran.
Au moment de I'arrestation,
il était vêtu d'une tenue de toile kaki, coiffé d'un calot vert et blanc
avec une étoile. II s'agit du nommé CHOUAIL CHAIBA KADAY, né le
20mai 1936 à ORAN. .
ENQUETE
Procédant à I'enquête,
nous Gendarmes de VARGAS, entendons :
CHOUAIL CHAIBA KADAY,
né le 20 mai 1 936 à ORAN, alias "SI NACEREDINE" demeurant à la
cité Sanchidrian, 6 rue Agathe à Oran, fils de feu Abdelkader et de Chouail
Chaiba Zahya célibataire, qui nous déclare à 8 heures, le 5 Mai 1962 :
"Hier 4 mai 1962, vers
10heures, lorsque les militaires m'ont appréhendé je réglais la circulation
sur la V.O. N°9 au Petit Lac. J'étais vêtu d'une tenue militaire de toile
kaki avec insigne FLN et coiffé d'un calot vert et blanc frappe de I'étoile
et du croissant. Dans
l'Organisation FLN, je suis
chef de la Police sous les ordres du responsable ATTOU, qui me paye
30.000 anciens francs par mois.
"Mes fonctions au sein
de cette organisation consiste :
1) à soigner les malades, en
qualité d'infirmier
2) je m'occupe de la police
du Petit Lac avec mon équipe, je surveille la fouille des véhicules et des
occupants de passage dans mon quartier, en qualité de lieutenant.
Pour ma part j'ai APPREHENDE
UNE DIZAINE D'EUROPEENS, que j'ai conduit au centre médical du Petit Lac
auprès de ATTOU.
Parmi ceux-ci, il y avait :
MARTINEZ,
50 ans, LOPEZ, 35 ans, HERNANDEZ, 32 ans, MACIA, 39 ans, GARCIA,
40 ans, FERNANDEZ, 27 ans, LOPEZ, 30 ans, GIL, 55 ans, MARSIA,
45 ans.
"Ces F.S.E. ont été
ensuite dirigés par I'adjoint de ATTOU surnommé "SI KADDOUR"
au centre d'interrogatoire, 23 rue Général Brossard à Oran.
"Les victimes étaient
vêtues uniquement de leur pantalon et d'un maillot de corps; Elles ont
subi les sévices suivants :
Nombreux coups de cravache sur
diverses parties du corps, par
le chef "NOUREDINE", arrosage d'eau a I'aide d'un tuyau
par "SI MOHAMES". Tortures à I'électricité par
"SI AISSA". J'ai
assisté à ces supplices en tant que membre de la Police F.L.N. Les
victimes criaient de douleurs.
"II existe à la Cité
des 4 chemins, rue 7 n° 220 des "abattoirs" tenu par Lachcene
Lahouari et son équipe.
Tous les gens ont été
contrôlés et appréhendés par Belacène Lahouari dans le secteur de
I'autoroute et de la Cité des 4 chemins, ont été directement dirigés
aux abattoirs.
"Là, ils ont été
étranglés ou égorgés par Belacène Lahouari, qui sans
pitié puis jetés dans la Sebkra du Petit Lac.
"Toute I'organisation
FLN de la région dépend de I'ALN mais nos membres agissent à leur guise.
"Chacun profite de la
situation : suivant son rang et son autorité, ATTOU a été récemment
battu et blessé très sérieusement par des Officiers de I'ALN pour sa
conduite. "Le Centre Médical du Petit Lac est tenu par le docteur NOUVIAN,
50 ans. Je connais aussi le Professeur JEANNOT, 22 ans, qui doit
instruire les jeunes musulmans.
Le 5 mai 1962 a 9 heures.
Lecture faite par moi de la
déclaration ci-dessus, j'y persiste et n'ai rien à ajouter, a y changer ou a
y retrancher (a signé au carnet de déclaration).
Vu les articles 63 et 65 du
code de procédure pénale, pour les nécessités de I'enquête nous estimons
devoir retenir CHOUAIL CHAIBA KADAY au bureau de la Brigade. Cette
mesure de garde à vue prend effet du 4 mai 1962 à 16 heures. De 16 heures le
4 Mai 1962 à 8 heures le 5 Mai 1962 CHOUAIL CHAIBA KADAY a
bénéficié d'un temps de repos de la chambre de sûreté de notre brigade. A
14 heures, nous procèderons à une seconde audition de CHOUAIL CHAIBA
KADAY, qui déclare :
S.I., les hématomes,
ecchymoses et blessures que je porte à la tête, aux poignets et au corps
proviennent des coups que j'ai reçu de la part de ATTOU et de I'ancien
"Fidai"
BOUCEMA
KADDA". Ils m'ont frappé pour mon manque d'énergie au sein de
l'organisation F.L.N. "
S.I : « je ne connais pas la
destination des gens appréhendés par notre organisation, je me contentais de
conduire nos prisonniers au Chef ATTOU et il m'arrivait souvent
d'assister aux interrogatoires ».
"MOHAMED BEN KADDA
JEN"(Démon-diable) demeurant au N° 10de la cité du Gai Logis est
le chef "Fidai" tueur de la région, cité des Oliviers et du Gai
Logis. Le chef des abattoirs a 5 hommes sous ses ordres qui sont : KADDOUR
-TAYEB -KOUIDER et AISSA et le FLN KADER. Ils sont tous
armés de P.A. 9m/m. Je sais qu'une vingtaine de F.S.E. et une dizaine de
F.S.N.A ont été tués par I'équipe de Belacène Lahouari. Ces
chiffres ne sont qu'approximatifs. J'ignore si des militaires ont été
appréhendés par notre organisation et s'ils ont été tués ou relâchés
».
Le 5 mai 1962 a 14 heures 30.
Lecture faite par lui de sa
déclaration, y persiste n'a rien a y changer, a y ajouter ou a y retrancher.
(A signé au carnet de déclaration).
"En raison des indices
graves et concordants qui dans I'état actuel de I'enquête existant contre
"CHOUAIL CHAIBA KADAY" de nature à motiver son inculpation
pour "Séquestrations arbitrages et complicité d'assassinats", le 5
Mai1962 à16 heures, nous portons ces faits à la connaissance de Monsieur le
Procureur de la République d'Oran. Ce magistrat nous fait part de nouveaux
textes permettant une garde à vue de quinze jours.
"Procédons une fouille
à corps de CHOUAIL CHAIBA KADAY, lequel n'a été trouvé porteur d'aucun
objet dangereux susceptible de servir à la manifestation de la vérité.
"Le 5
mai 1962, à 19 heures, nous procédons à une nouvelle audition de CHOUAIL
CHAIBA KADAY, lequel n'a été trouvé porteur d'aucun objet
dangereux susceptible de servir à la manifestation de la vérité.
"Le 5
mai 1962, à 19 heures, nous procédons à une nouvelle audition de CHOUAIL
CHAIBA KADDA qui déclare;
"Le 27
avril 1962 entre 12 et 13 heures, avenue de Sidi-Chami, j'ai arrêté une
dizaine d'européens, je ne connais pas leur nom. Ils étaient dans deux
voitures, il y avait une Simca grise où ils étaient 5 personnes, rien que
des hommes âges de 25 à 50 ans. Nous avions mis des pierres en travers de la
route. Nous étions 6 policiers et la foule évaluée à 60 personnes toutes
musulmanes.
La foule
possédait des pierres, des bâtons ainsi que des couteaux. Nos policiers et
moi étions armés de Beretta 9mm avec chargeurs pleins. Ces P.A. n'avaient
pas de numéros. C'est cette Simca qui est arrivée la première sur le
barrage.
La foule
commença à jeter des pierres et à casser les vitres de celle-ci. Les 5
occupants ont bien été massacrés par la foule pendant 10 minutes. Au moment
est arrivée une autre voiture, marque Versailles, chargée de 5 occupants
européens. Entre temps étaient passées d'autres voitures conduites par des
Musulmans que nous avions laissées passer après contrôle.
Cette
Versailles a fait I'objet également de jets de pierres de la part de la foule,
les occupants ont été massacrés aussi. Je suis monté au volant de la
Versailles en repoussant le chauffeur. Un de mes policiers Mohamed Ben
Driss, 22 ans demeurant Bloc 13 n° 25 au Petit Lac à bord de la Simca.
Nous avons regagné le S.A.U. (Petit Lac) poussés par la foule escortée par
nos policiers, les occupants des voitures n'avaient fait jusqu'à ce moment
I'objet que de coups de pierres.
Nous avons
fait entrer les 10 occupants dans la salle de la S.A.U., la foule est restée
dehors. Elle voulait entrer dans le bureau avec mes policiers, je l’ai
empêchée. "Kaddouri Mohamed, chef Fidai, était là avec son
équipe, "Nous avons du sortir, des voitures, les Européens en les
tirant par les bras, ils ne marchaient plus, ils étaient presque morts à la
suite des coups de pierre. Nous les avons allongés les uns sur les autres
en tas dans le bureau, ils respiraient encore. Kaddouri les a fouillés
et leur a enlevés les portefeuilles qu'il a gardé. J'ignore ce qu'il en a
fait. C'est alors que le grand patron ATTOU chef du secteur du Petit
Lac est
arrivé. II a fait venir une infirmière nommée Kheira. Elle leur a
pratiqué les premiers soins (Mercurochrome). Par la suite, nous les avons
conduits tous les 10 au centre médical. Ils sont restés là une semaine.
Lorsqu'ils ont été mieux ATTOU les a interrogés leur demandant s’ils
faisaient partie de I'O.A.S. Evidemment, ils ont dit non et ATTOU les a
relâchés, mais la foule venue nombreuse autour du Centre les a
immédiatement lynchés à mort à coups de pierres et de couteaux ».
S.I, « je l’ai
vu, j'étais présent ».
S.I. « la
foule a embarqué les 10 cadavres sur une camionnette 203 Peugeot bâchée et
les a conduit à la Seb-kra du Petit Lac, j'ignore l’endroit exact
».
S.I. « les
noms que je vous ai donnés dans la première déclaration sont faux car je
n'ai pas vu leur identité et je ne leur ai pas parlé ».
S.I. « je
sais que de nombreux européens ont ainsi été lynchés par la foule et qui
même ont été conduits morts au Petit Lac. Des femmes et même des
enfants sont morts ainsi, les véhicules de ces victimes sont
gardés par nous et les pièces de certaines servent à réparer les autres.
"Avant
les 10 européens dont je viens de parler, j'en ai attrapé d'autres dans les
mêmes conditions. Je me souviens plus particulièrement de 4 européens dans
2 véhicules. L’une, une Dauphine rouge, l’autre une Simca Aronde ancien
modèle Ils avaient eux aussi été massacrés par la foule à coups de
pierres, avenue de Sidi-Chami. Eux aussi ont été amenés à la S.A.U. du
Petit Lac par moi et mes hommes dans le but de les torturer à la
cravache.
Dans le
bureau de la S.A.U., le nommé Mohamed les a arrosé d'eau. Nous ne les
avons pas attachés, car ils étaient assommés et saignaient de la tête,
nous les avons mis torse nu et je les ai frappé avec une cravache (nerf de bœuf).
Cette arme est actuellement dans mon bureau de la S.A.U. Durant un quart
d'heure Kaddouri et moi les avons frappés ».
"S.I. «
Je les ai frappés parce que c'étaient des pieds-noirs, j'ai reconnu que
c'étaient des pieds-noirs parce que l’un d'eux avait le cachet de I'O.A.S.
imprimé à l’encre bleue dans le dos. Les autres n'avaient rien mais je les
ai frappés aussi, car ils étaient ensemble.
"Apres
les avoir frappés, j'ai sorti mon 9 mm et j'ai tiré deux balles à bout
portant dans la tête sur deux d'entre eux Kaddouri a tiré de la
même manière sur les deux autres européens.
"Puis,
nos hommes ont embarqué les cadavres dans la camionnette Peugeot 203 374 EX
9G qui se trouve encore à l’heure actuelle au Petit Lac, Kaddouri a pris le
volant et est parti avec 6 hommes armés de Beretta.
"C'est
Kaddouri qui a pris là encore les portefeuilles. S.I. J'ignore l’identité
de ces victimes. S.I. Je sais que sur les 10 premiers, 4 ont été égorgés
par la foule, mon camarade Abdelkader Ben Noucehn demeurant a la cite des
Oliviers me l’a dit et d'ailleurs ils étaient armés de couteaux et de
haches. Sur les 4 autres un seul a été égorgé par Kaddouri.
C'est tout ce
que j'ai fait depuis la deuxième fois que je suis au Petit Lac. II y a
d'autres groupes qui font comme moi la chasse, avec la foule musulmane, aux
Européens. "J'ignore combien ils peuvent en avoir tués. J'en ai vu 4,
égorgés par Belkacem Laouar aux 4 Chemins comme je vous l’ai déjà dit,
rue 7, le numéro que je vous avais donné est faux, car je l'ignore. Belkacem
en a égorgé 20 environ. La pièce ou ont lieu ces égorgements est grande,
n'a qu'une fenêtre qui donne sur la rue 7, pas de meubles, pas d'abat-jour.
Les 4 corps étaient dans le fond de la pièce, face à la porte. Cette pièce
est éclairée par une ampoule. Les murs de cette pièce sont peints en rouge
avec une bande noire près du plafond qui est blanc.
"Au
moment de mon arrestation par les militaires, je n’étais pas armé, j'avais
laisse mon revolver au bureau. "Je sais aussi qu'ATTOU a torture à l’électricité
une musulmane enceinte sous les yeux de son mari. II a aussi emprisonné des
musulmans.
Le 5 Mai
1962 à 10 heures 30.:
Lecture faite
par moi de la déclaration j’y persiste et n'ai rien à y changer, à y
ajouter ou à y retrancher. (A signé le cahier de déclaration)
Le 7 Ma i
1962, à notre brigade, nous gendarme CALLEJAS entendons : ANTON
Yvon né le 8 février 1951 à Oran qui nous déclaré à 11 Heures 15 en
présence de sa mère, Madame ANTON Françoise :
Le mardi 17
avril 1962, je me trouvais dans le véhicule de mes parents et avec eux
lorsque passant Avenue de Sidi-Chami en direction de La Sénia un F.N.S.A nous
a lancé une pierre sur notre 4 CV Renault Grise. Plus loin une voiture, genre
Aronde camionnette, couleur bleu sale, toute rayée (peinture enlevée) venant
dans notre direction de marche nous a dépassés et s'est mise en travers nous
barrant la route. Mon père qui conduisait a du immobiliser notre voiture pour
éviter la collision. II y avait une foule de gens F.S.N.A. Parmi eux certains
étaient porteurs de haches. Un F.N.S.A s'est adressé alors à nous, nous
ordonnant de descendre. Mon père a mis pied à terre ainsi que ma mère
tandis que je descendais de la voiture. J'ai fait le tour du véhicule vers l’arrière
pour descendre ma petite sœur Joëlle âgée de 8 ans et demi. A ce moment
précis, j’ai remarque la disparition de mon père. Ma mère était amenée
par deux musulmans que la poussaient vers la route principale du Petit Lac,
voyant cela ma petite sœur et moi avons suivi ma mère et ses gardiens et les
avons rejoints à l’hôpital du Petit Lac. Nous avons été placés dans une
pièce ou il y avait un tas de linge, nous avons été libérés le soir même
sous la conduite d'un garde mobile.
Parmi toutes
les photos que vous me présentez, je reconnais formellement l’une d'elles
qui représente le portrait du chef fellagha qui est venu nous rendre visite
au centre médical du Petit Lac (NOUREDINE, alias BENOUACEUR,
alias SI OMAR). Je n'ai plus revu mon père.
Le 7 mai à
12 heures.
Lecture faite
par moi de ma déclaration ci-dessus, j'y persiste et n'ai rien à y changer
à y ajouter ou à y retrancher. (L’intéressé, mineur, n'a pas signé le
carnet).
Même jour,
même lieu, nous Gendarme CALLEJAS, nous entendons :
ANTON
Françoise, née de la CRUZ le 1/11/1929 à Oran, demeurant Cité Jean de
la Fontaine Bt C.A et Rue Président Fallières à Oran, nous déclaré à 12
heures 30 : le 17 avril je me trouvais dans le véhicule 4 CV Renault 729 DE
9C conduit par mon époux. Nos deux enfants se trouvaient sur la banquette AR.
Nous roulions sur l’Avenue Sidi-Chami en direction de La Sénia, il était 8
h 30 environ lorsqu'au milieu de cette artère un F.N.S.A. nous a jeté une
pierre et mon mari a accéléré. Cent mètres plus loin une camionnette
tôlée genre Simca ou Juva quatre de couleur bleu sale et rayée de blanc
nous a doublé et s'est mise en travers de la route. A bord de ce dernier
véhicule, il n'y avait qu'un seul F.N.S.A. d'une trentaine d'années, brun
portant une moustache, mon mari a du s’arrêter pour éviter le pire. La
foule musulmane s'est alors précipitée sur nous, du côté gauche de la
voiture un FNSA a frappé à la portière intimant l’ordre d’ouvrir, ce
que j'ai fait.
II a alors
jeté toutes les affaires et paquets que je tenais sur mes genoux et a
fouillé le véhicule. Sur son ordre, j'ai mis pied à terre. J'ai
immédiatement été isolée du reste de la voiture. Deux musulmans m'ont pris
par la main et m'ont entraîné à vive allure vers leur hôpital. La foule se
montrait haineuse et voulait me battre. Durant ce trajet, j'ai vu un groupe de
musulmans qui entraînaient mon mari et le frappaient violemment. A ce moment
là, un camion G.M.C militaire est passé sur le terre-plein de l'hôpital et
les militaires m'ont regardé. Je leur ai fait signe "Au secours !",
les appelant désespérément, car j'avais alors les mains libres, le camion a
marqué un net ralentissement les militaires m'ont regardé et sont repartis !
Avant d’entrer dans hôpital j'ai tourné la tête et j'ai vu mon mari par
terre et des arabes qui s’acharnaient sur lui. Puis, on m'a fait entrer dans
une pièce avec mes 2 enfants qui me suivaient librement. Vers 13 heures, un
gendarme mobile sans arme est arrivé et j'ai été libérée avec mes 2
enfants, et 10 F.N.S.A. qui étaient détenus dans un autre local de
l'hôpital. Au moyen d'une Jeep et de 2 half-tracks, nous avons été dirigés
sur le P.C. du Cdt HUGON, avenue de Sidi Chami puis au Lycée Ardaillon chez
les gendarmes mobiles. A 17 heures enfin j'ai pu rejoindre mon domicile.
Durant mon
séjour à l’hôpital des fellaghas du Petit Lac, plusieurs chefs FLN et des
infirmières sont venus me rendre visite, ils m'ont dit que je ne risquais
rien, qu'ils m'avaient placée là pour ma sécurité.
Parmi les
photos que vous me présentez je reconnais formellement l’une d'elles qui
représente le portrait du chef fellagha qui m'a parlé BOUMEDIENNE Ali,
alias BENAOU-MEUR, alias SI OMAR.
S.I. Je
reconnais l’individu que vous me présentez et que vous dites se nommer CHOUAIL
CHAILA. Ce dernier était parmi la foule et les individus qui m'ont
arrêtée. Je l’ai revu dans la cour de l'hôpital fellagha.
Ce jour-là
vers 12 heures, l’un des membres FLN de cet hôpital un européen d'origine
métropolitaine est venu prendre ses repas avec les autres malfaiteurs; je l’ai
supplie de me donner des nouvelles de mon mari. II est sorti et quelques
instants après il est revenu en me disant que mon époux se portait bien et
qu'ils l’interrogeaient. J'ai vu un docteur européen âgé de 60 ans
environ aux cheveux blancs (Docteur NOUVIAN) qui s'occupait des malades.
J'ai conversé quelques instants avec lui, il m'a dit qu'il était là depuis
2 mois mais ne m'a pas révélé son identité.
Je n'ai plus
revu mon mari ni notre voiture. Je n'ai su qu'il y avait des européens
prisonniers en même temps que moi que lorsque nous avons été conduits
ensembles vers le PC du Cdt HUGON. II y avait alors 10 hommes, mes 2 enfants
et moi-même.
Je précise
que les membres du FLN ne m'ont pas interrogée, je n'ai pas subi de sévices
de leur part.
Le 7 mai 1962
a 13 heures.
Lecture faite
par moi de la déclaration ci-dessus, j'y persiste et n’ai rien à y ajouter
ou à y retrancher (a signé le carnet de déclaration).
Après avoir
confronté Mme ANTON Antoine avec CHOUAIL CHAILA KADAY, nous
recueillons une nouvelle déclaration de ce dernier à 14 heures.
"J'ai vu
la dame européenne ici présente que vous dites se nommer Madame ANTON au
centre médical du Petit Lac en conversation avec BENAOUMEUR alias SI
OMAR en réalité BOUMEDIENNE Ali). Ce dernier est le grand chef
pour tous les quartiers d'Oran. II est sous les ordres d'ABDELHAMID.
"S.I.
L'individu qui conduit la camionnette Renault Blanche et une 403 noire avec
poste de radio sur l’avenue Sidi Chami et au Petit Lac est le Fidai BOUCERA
Kada, c'est certainement lui qui a provoque l’arrêt de la 4 CV de M.
ANTON, d'ailleurs il correspond au signalement donné par Mme ANTON, II
porte une moustache, il loge au Gai Logis. "Je n'ai pas vu M. ANTON
mais j'ai appris par les membres de mon organisation qu'il avait été tué
par eux et son corps jeté à la Sebkra, car tous les morts sont conduits là-bas.
Parmi les photos que vous me présentez, je reconnais formellement l'un
d'entre eux qui représente les portraits de :
1) Un
individu au visage noir portant de grandes moustaches, qui conduit un V.L.
genre américain, je ne connais ni son nom, ni sa fonction au sein de I'ALN (Tenazet
Abdelkader "SI KOUIDER").
2) ZAFF
Djillali, recherché par les forces de l’ordre actuellement au maquis de
I'ALN, il habitait à Sanchidrian près de mon domicile.
3)Le grand
chef "SI OMAR" précédemment désigné alias BENAOUMEUR
(BOUMEDIENNE Ali).
"Depuis
que je travaille pour I'ALN c’est-à-dire depuis le cessez-le-feu, j'ai eu l’occasion
de connaître divers locaux de l’organisation qui sont installés ainsi que
suit :
- A la cité
des 4 chemins, rue 7 les "Abattoirs" tenus par BELAHCENE Lahouan.
- 2 bureaux
de la cité des Oliviers, sans adresse précise.
- Le centre
médical du Petit Lac, en bordure du V.O. n° 9 ou se trouvait Mme ANTON
et le Docteur NOUVIAN.
- La S.A.U.
du Petit Lac ou les gens subissent des sévices de KADDOURI Ben MOHAMED
et de son équipe.
- Le grand
centre ou les F.S.E. sont habituellement emprisonnés sis 23 rue Gl Brossard.
Ce lieu est dirige par SI NOUREDINE;
"J'ai
remarque devant ce local un nombre important de véhicules volés ou
appartenant aux F.S.E. prisonniers. "Je sais qu'il existe d'autres locaux
dits 2eme bureaux, mais je ne connais pas leurs adresses exactes, néanmoins
ils sont situés au Douar Montréal, au douar de la Gare, à La Sénia, à
Cholet, à la Cité du Petit Lac, rue Mohamed Bey en ville nouvelle et rue des
Amandiers au Faubourg Lamur..
Le 7 Mai 1962
à 15 Heures.
Lecture faite
par moi des déclarations ci-dessus, j'y persiste, je n'ai rien à y ajouter,
rien à changer ou à retrancher (a signé au carnet de déclaration).