Un
jeune soldat français
aux travaux forcés dans les mines
de la république démocratique Algérienne
Le 21 juillet 1962, par conséquent quatre mois après Evian; il est six
heures, les hommes ont quartier libre, et notre garçon sort de la caserne de
Maison-Carrée.
A huit cent mètres de là, il est enlevé en camionnette et conduit dans une
briqueterie. Il est mis dans un four, éteint bien sûr. Il y a déjà un
Européen; seize autres arriveront dans les heures qui suivent.
Trois autres fours sont remplis de la même façon. La nuit se passe à redouter
que le four s'allume.
Le lendemain, on les emmène en camions bâchés.
Puis ils marchent, ils marchent, ils marchent; ils n'ont pas le droit de se
parler ni de se faire des signes. Ils sont une soixantaine et dès que
l'un deux ne peut plus marcher, les autres creusent sa tombe et on le
laisse là.
Il arrive ainsi à la mine de Miliana. Il descend au fond. Ils sont
soixante à son poste, soixante Français nus qui travaillent dans le
fond de la mine et qui, en tout et pour tout, ont à boire un verre d'eau par
jour et une poignée de semoule comme nourriture.
Il lèche l'humidité des parois, il boit son urine.
Les examens médicaux ultérieurs le démontrent.
C'est d'ailleurs là qu'un jour un ministre algérien en visite à la
mine lui donne un coup de pied dans la figure dont il porte la trace,
parce qu'il ne s'est pas levé assez vite alors qu'il était à son quart de repos.
Il sort de la mine parce que, lorsqu'ils n'ont plus de rendement, on les
remplace.
Puis, c'est la marche dans le djebel qui reprend. Il s'évade une fois; il est
repris au bout d'un kilomètre.
Il s'évade une deuxième fois. Il est encore repris. On le torture. On lui
arrache les ongles des orteils, on lui abîme les jambes. Il est venu dans
cette maison me rendre visite tout récemment.
J'ai donc vu cet homme et j'ai là tout son dossier.
Il s'évade alors une troisième fois avec deux camarades. Ils seront tués.
Lui ne l'est pas. Il est recueilli dans un fossé, épuisé, par des Français
d'Algérie qui le ramènent à Alger, qui l'embarquent sur un chalutier.
Il est attendu à Marseille.
On le débarque et on l'achemine sur son domicile en mars 1963.
Journal Officiel, p. 2572).
Bien alors en plus du J.O. nous vous donnons son nom j’espère ainsi que vous
allez être deffinitivement convaincu, n’est-ce pas ?