«l’Agonie d’Oran»de Geneviève de TERNANT
(éditions J Gandini – Calvisson) |
TÉMOIGNAGE DE MADAME
BENHAMOU
P.81
du Tome 3
Je fais un effort
considérable pour vous écrire.
Le 5 juillet, date
inoubliable pour nous, Oranais et Oranaises.
Une des premières
victimes qui était au restaurant fut Madame Levy née Emelie Benkemoun;
elle avait 7 enfants qu'elle avait laissés à Paris, chez sa belle-mère. Elle
était venue à Oran pour prendre quelques affaires précieuses.
Elle et son mari
étaient venus faire les adieux à sa sœur, ma belle-fille, qui les avaient
invités à déjeuner du "merot au Kesbor", elle a refusé pour manger au
restaurant, en amoureux, avec son mari.
Hélas, le destin lui
a été fatal. Les premières balles furent pour elle; son mari s'est jeté sur
elle, c'est ce qui l'a sauvé. Il est revenu chez moi, affolé, en me criant :
"On
a tué ma femme".
Inutile de
vous décrire la scène déchirante qui s'en est suivie.
Nous étions
bouleversés, et je crois bien que c'est ce crime épouvantable qui nous a fait
partir d'Oran.
Aujourd'hui, 14
juillet, j'ai regardé le défilé. C'est surtout la Légion que je voulais voir, ce
régiment d'élite qui faisait, à Sidi-Bel-Abbès, la gloire de l'Algérie
Française. J'ai eu le cœur serré et j'ai pleuré tout ce que j'ai pu.
Adieu, mon pays que
je ne reverrais plus, et mon chagrin est toujours présent.
Je m'arrête, mes yeux
sont pleins de larmes. Je vous embrasse avec toute mon affection.
Mme Benhamou
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Cette lettre m'a été
écrite le 14 juillet 1997. Cette dame âgée, fidèle lectrice de l'Echo
de l'Oranie, est devenue, par téléphone une amie très chère. Je ne crois pas
que l'on puisse lire son témoignage sans émotion.
Malheureusement, je n'ai pu lui faire préciser le nom du restaurant où cette
jeune femme a été tuée. Son nom, relevé dans la liste des morts européens à
l'hôpital civil d'Oran, parue dans l'Echo d'Oran du 6 au 9 juillet 1962,
est signalée dans le premier tome de l'Agonie d'Oran, page 212. Et
annexe II, page 310.
G.de
Ternant
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