EXTRAITS:
Le Parti communiste algérien est issu du Parti communiste français (PCF),
qui en 1924 crée en Algérie une Section ne comprenant que des militants européens.
En 1935, cette Section se transforme en organisation distincte, le Parti
communiste algérien fonctionnant sous la tutelle du PCF. Son organe officiel de
presse sera jusqu'au 12 septembre 1955 l'hebdomadaire «Liberté». Relayé
ensuite par l'intermédiaire du «Travailleur algérien» de l'UGSA,
ex-CGT, (qui fera l'objet d'un arrêté d'interdiction le 24 mai 1956), le
quotidien algérois communisant, «Alger Républicain», participe à la propagande
en faveur des rebelles jusqu'en septembre 1956.
Avant le 1er novembre 1954, toutes les tentatives des dirigeants du PCA pour
réaliser l'unité d'action avec les nationalistes échoueront.
Apres te 1er novembre, le PCA s'efforce de créer le maximum d’agitation
par l’intermédiaire de la CGT, et engage les dockers à refuser de décharger
le matériel de guerre en Algérie (Benoit-Frachon se rend en Algérie
pour assurer les nationalistes de l'appui de la CGT et de la FSM).
Participation à la lutte armée
Le PCA, qui a pris position dès 1952 pour l'indépendance algérienne, hésite
tout d'abord à s'engager André Moine et Camille Larribère
estiment prématurée l'entrée dans la lutte armée.
Certains dirigeants ont cependant pris des contacts avec le FLN. ainsi Mohamed
Guerrouf avec Ben Boulaid Mostepha, responsable de l'Aurès. Le Secrétaire
du PCA. Paul Caballero, organise alors une aide logistique des rebelles
par le canal du Secours populaire algérien (SPA).
Il faut attendre le 13 mai et le 20 juin 1955 pour que le Bureau politique et
le Comité central décident la participation à la lutte, initialement sous la
forme des CDL (Combattants de la Libération) formés dans les grandes villes.
Des attentats individuels sont perpétrés à Alger, Oran, Constantine et Blida.
D'autres militants rallient les maquis FLN dans l'Aurès et le Tlemcenois.
L'Implantation d'un maquis communiste présente des difficultés en matière
de soutien logistique, d'armement, de connaissance du terrain, et en raison de
l'opposition prévisible des bandes de l'ALN. La région du Chéliff, carrefour
entre Alger et Oran, paraît la plus favorable, du fait de l'absence de bandes
du FLN et de l'existence de cellules communistes dans le bled et à Duperré,
ville connue comme «la petite Moscou».
La désertion de l'aspirant Maillot
L'initiative de l'aspirant Maillot va permettre de résoudre le problème
de l'armement. Henri Maillot était un employé du journal Alger-républicain,
notoire militant communiste comme son père. Il ne dissimulait pas ses
convictions politiques et s'était rendu au Congrès des Jeunesses
communistes de Budapest. Un mois après que le PCA eût été frappé de
dissolution pour menées subversives, il était rappelé sous les drapeaux en
octobre 1955 au 57ème Bataillon de Tirailleurs à Miliana.
Apprécié à son journal comme «un camarade d'une intégrité morale
absolue», en fait il cachait son jeu. Interrogé par son chef de
bataillon, il avait affirmé qu'il ne s'était jamais rendu à Budapest et qu'il
avait quitté la CGT en 1950-1951. Il avait même signé une déclaration sur l'honneur
attestant sa non-appartenance au PC. Une fiche de renseignements de la Sécurité
militaire aurait dû lui interdire toute mission de confiance. Ainsi son intégrité
morale était-elle réservée à son Parti.
En avril 1956. son bataillon se transformait en 504ème Train, nécessitant
la restitution des armes excédentaires à l'ERM d'Alger, mission imprudemment
confiée à Maillot. Celui-ci, dans le secret le plus absolu, s'entendait
avec le chef du PCA, le docteur Hadjeres à Alger, pour lui livrer tout
son chargement. Profitant d'une grave négligence de l'ERM. il amenait son
camion le 4 avril 1956 dans La forêt de Bainem, où l'attendait un comité
d'accueil de trois militants. Après avoir neutralisé Le chauffeur du camion,
retrouvé ligoté, les quatre hommes chargeaient les armes dans une camionnette
et rejoignaient Alger, où les armes étaient entreposées dans une villa
d'Alger-Plage.
L'affaire eut un grand retentissement, d'autant plus qu'elle s'accompagnait
d'un vol massif d'armement : 74 revolvers, 10 PA. 120 PM Sten, 1 PM Thomson, 53
fusils Lebel, 4 fusils Mas, 1 fusil US 17, et des munitions.
Maillot se réfugia ensuite à Alger, fut hébergé une nuit au presbytère
de Saint-Joseph (Bab el Oued) par l'abbé Scotto, qui le mit à la
porte quand il l'identifia, mais l'envoya quelques jours au presbytère d'El
Biar, aux bons soins de l'abbé Desrousseau.
Un communiqué des «Combattants de la Libération» annonce alors que
l'aspirant Maillot est passé aux forces de la Résistance. Dans des
lettres adressées à la Presse, l'ex-aspirant exhorte les jeunes appelés à déserter.
Le Maquis rouge
Constitué initialement par Abdelkader Babou, Mohamed Boualem et Mustapha
Saadoun, le maquis s'installe d'abord dans une grotte des Béni Boudouane.
et reçoit, grâce à la complicité de l'institutrice Marylise Ben Haïm,
Le renfort du sous-lieutenant déserteur Abdelhamid Guerab, de l'exalté Maurice
Laban (de Biskra, ancien des Brigades internationales) et le 7 mai d'Henri
Maillot. Leur effectif ne dépassa jamais huit hommes- Armés initialement
de 4 vieilles armes de poing, ils tuent un des chefs de
village des Béni Boudouane, fief du bachaga Boualem. Echappant à un
ratissage, ils franchissent le Chéliff et se réfugient dans une ferme du douar
Medjadja»
Ayant reçu 20 armes du lot volé, ils font une expédition punitive dans les
Béni
Rached où ils assassinent quatre «traîtres», ils commettent alors
l'erreur de revenir dans les Béni Boudouane, où un cavalier prévient le
bachaga, tandis que les habitants capturent leur ravitailleur et le livrent au
capitaine Conill, chef de SAS.
Maillot et Laban sont tués le 5 juin dans l'opération qui est
rapidement montée par Conill, avec la participation de la 2ème
compagnie du 504ème BT à laquelle appartenait Maillot,
Guerab et Boualem réussissent à s'enfuir, ils seront arrêtés
début septembre. Saadoune rejoint Oussedik ; il deviendra adjoint
politique de Si Bagbdadi, le chef de la future zone 2 de la wilaya 4.
Après l'affaire, le PCF se démarqua du PCA, mais le député Ramette
déclara en novembre que Maillot a accompli son devoir de patriote algérien».
Pour Henri Alleg, cette héroïque aventure « menée par des
personnages exceptionnels, fidèles à leur idéal» est une épopée qui ne
doit pas être oubliée. La trahison en effet ne s'oublie pas, Allah,
n'aime ni le traître ni le criminel (Sourate IV, 107).
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