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De Gaulle
 
 

Commencé en 1971 pas encore fini en 2001. J’avais appelé ça « un livre »

Il reste néanmoins que j’en fais le :

1er témoignage - 1ères preuves -

Ce livre je le dédié au Ministre de la

Défense Nationale et à mes camarades en

activités. (de l’époque)

 

U N E    V I E     D E    G E N D A R M E

Partie IV

...

Nous voilà arrivé sur la piste du Raizet, par une belle journée ensoleillée et une température d'une trentaine de degrés. Il a fallu déshabiller les enfants et nous même ôter nos vestes et tricots en lainage.
Un véhicule de la Gendarmerie nous attendait à la sortie. 
Il y avait du peuple dans l'aéroport, les abords et sur le parcourt nous conduisant à Pointe à Pitre Sud.
Cela nous faisait drôle de voir tellement d'antillais d'un coup. Les femmes avec des coiffes coloriées et les hommes vêtus de vestes par une chaleur pareille.
La brigade de Pointe-à-Pitre sud, une vieille battisse des années 1900, flanquée d'un étage avec balcons donnant sur la place de l'Eglise. Une odeur de fleur et d'épices mélangées à l'air marin d'un port situé à proximité, nous rappelaient l'Algérie. 
La luminosité nous forçait à garder les yeux mi-ouverts. Logés dans la chambre de passage nous décidons de visiter le centre avant la tombée de la nuit.
La Place dominant le port de Pointe à Pitre était enchanteresse. Il y avait un beau kiosque où ce jour la, des danseuses et danseurs en tenue folklorique s'exhibaient. Ils étaient accompagnés d'un orchestre local jouant une musique entraînante style samba-meringué, améliorée par de la musique locale.
J'ai pris mes premières photos qui allaient être celles d'une longue série de trois ans.
De retour dans notre chambre, extenués, nous nous affalions les quatre sur le seule lit dont nous disposions. Nous n'étions pas des officiers, hélas pour nous.
Quelle nuit, plutôt quel cauchemar. Le premier sommeil passé je suis réveillé par des démangeaisons sur tout le corps. 
Les petits n'arrêtaient pas de se gratter. Ma femme ronflait la fatigue l'avait épuisée.
En raison de la chaleur suffocante, sans ventilateur, une fenêtre intérieur fermée, nous dormons torse nu avec le bas de pyjama. Une heure du matin nous voilà tous réveillés, des piqûres de moustiques un peu sur tout le corps. Des moustiques, il y en avait partout dans la pièce. Ma femme s'empressa de passer de la crème aux enfants pour atténuer la douleur. Nous n'avions pas de bombe flytox puisque personne nous avait prévenu du danger. Nuit blanche jusqu'au petit matin. Assommés par la fatigue la famille tombait dans un sommeil profond brusquement brisé par les sons bruyants des cloches de l'église sise approximitee. Nuit blanche jusqu'au petit matin. 

Un gendarme se pointe vers 07h00 pour m'avertir qu'un véhicule me conduira au Groupement sis à St. Claude sur la Basse-Terre, à une soixantaine de kilomètres de Pointe à Pitre.

La règle voulait que le Commandant du Groupement reçoive les nouveaux arrivés.

Ce fut une belle balade. La différence entre les deux " terres " était énorme. D'abord la Basse-terre au sol volcanique, ne comporte que des montagnes verdoyantes dont les moindres clairieres sont plantées de bananerais. Le climat est plus frais que dans la Grande-Terre et plus agréable à y vivre, surtout à St.Claude construit sur les hauteurs et sur le versant de la montagne. Sur La Grande-Terre nous trouvons des plages de sable blanc et fin avec une eau turquoise alors qu'en Basse-Terre, le sable des plages est plutôt brun et grossier. Cela donne à la mer un aspect de profondeur angoissante. La température de l'eau est en générale entre 25 et 30 degrés C. toute l'année. 
Pour y arriver, nous avons traversé de jolis petits villages, Petit-Bourg, Capesterre, Trois-Rivières puis Basse-Terre avec son port et sa cité bruyante.
Je fais la connaissance du personnel du Groupement et finalement le commandant me reçoit. On fait connaissance puis il m'apprend que je suis affecté à Saint-barthélemy, une Ile située au Nord de la Guadeloupe.
Ce fut une surprise. Je devais rejoindre ma nouvelle affectation dans les meilleurs délais.
Quelques jours après nous partons sur Saint-Barthélemy par un DC3 à hélices avec escale à Saint-Martin une île mi-Hollandaise mi-Française. Apres une heure d'attente, nous montons dans un piper, un moteur six places, c'est à dire : le pilote et nous quatre puis une place restée vide pour le bonheur des enfants. Direction l'île de St.Bathelemy, environ trois-quarts d'heure de vol sur la mer. Mon épouse s'affole à l'approche de l'île. Nous n'apercevons pas de piste et nous avons l'impression d'aller atterrir sur le col entre deux montagnes. Le pilote nous crie avec un large sourire, de ne pas s'affoler. Sitôt le col passé en raz-motte, il pique une descente abrupte sur ce que nous croyons être un sentier de terre rouge. Le piper se pose en douceur laissant une traînée de poussière derrière lui et s'immobilise en bout de piste où une jeep de la gendarmerie nous attend. Vraiment dangereuse cette piste. Par la suite j'allais pique-niquer à l'occasion sur la plage sise à la fin de la piste pour voir les petits avions atterrirent. Par moments j'avais l'impression qu'ils allaient toucher la route du col.

Lorsque j'écris ce passage la coïncidence a voulu que j'apprenne par la télévision qu'un avion transportant des passagers de Saint-Martin à Saint-Barthélemy s'est écrasé à l'atterrissage faisant six morts. Surpris également d'entendre et de voir le nouveau maire monsieur Magras. L'un des fils du Magras que j'ai connu. Ainsi que le petit-fils de Monsieur Lédée propriétaire du terrain d'aviation à mon époque.
.
A notre arrivée, le gendarme, faisant fonction de chef de poste, nous présente au pilote qui s'avert être le maire de Saint-Barthélemy Monsieur Dehaenen.
Avant l'atterrissage, j'avais remarqué une belle plage de sable blanc en deux parties. Elles étaient séparées en leur milieu par un énorme rocher sur lequel il y avait une grande construction. Nous rêvions de plages depuis notre départ d'Algérie. Nous voilà partis tous les cinq en direction de Gustavia, ainsi s'appelle la capitale de l'île.


Nous sommes passes par le fameux col que nous avions vu d'avion. La route tortueuse était en ciment et étroite où juste deux véhicules pouvaient à peine se croiser. Avant d'entreprendre la descente vers Gustavia au dernier virage nous avons une vue magnifique du village et de la rade. Pratiquement toutes les habitations sont du style colonial avec les toits pointus et en tôle.
La caserne est construite sur le versant de la montagne qui domine la baie. Une construction en dure pour le bas, et un étage en bois style colonial avec une cour à l'arrière. Un bel arbre, dont le feuillage d'un vert vif recouvre les trois-quarts du terrain. C'est un " quenetier ",(inconnu au dictionnaire).Il fait des grappes de fruits ronds et verts de la grosseur d'un cochonnet de pétanque. Les fruits sont appelés des " quenettes ". Une fois la peau retirée, il y a une gélatine blanche très mince qui recouvre le noyau. C'est cette gélatine gluante qui se mange. C'est doux et âpre. Les enfants adoraient ça. 

Notre appartement comprenait une pièce et demie puis une cuisine. Tout était relativement simple sans aucune commodité. Le parterre était en ciment. Une fenêtre de taille moyenne et une porte simple donnaient sur une rue empierrée. Deux autres fenêtres similaires donnaient sur un chemin en ciment accédant aux maisons situées sur le haut. Les bureaux se trouvaient dans une petite cour au même niveau que notre logement. Il y avait un bureau pour le chef de poste et un pour deux gendarmes. Cinquante pour cent de la cour du bas servait de citerne d'eau. Un escalier donnait accès à l'étage, à l'appartement du chef de brigade.
Les lits étaient recouverts d'une moustiquaire blanche. Un inconvénient de taille, il n'y avait pas un brin d'air dans ce sous-sol. Nous avons vécu dans cette fournaise des moments torrides. Au début nous avons été surpris et effrayés par de gros crabes de " terre " qui montaient à notre hauteur. Par la suite nous avions l'habitude et au petit matin nous les poussions dehors, avec un bâton. 

Première tournée officielle pour visiter l'île et prendre des contactes avec les notables et la population..

Présentation à Monsieur le Maire, Pilote et propriétaire de l'Eden Rock, hôtel construit sur le fameux rocher que nous avions vu depuis l'avion. Présentation de son épouse et ses enfants. Son épouse une très belle femme au type " béquet ". Elle était métissée (Européen/Antillais). Deux filles, l'une de quinze ans l'autre plus petite 8 ans environ, étaient bronzées et il me semble qu'elles avaient les yeux d'un bleu turquoise.
Nous avons pris un planteur que j'avais trouvé succulent parce qu'il avait le goût du rhum et de la noix muscade. Il fallait faire attention ça soulait son bonhomme à partir du deuxième. J'ai fait ainsi la connaissance des propriétaires des trois hotel-restaurants de l'Ile. 

L'île de Saint-Barthélemy n'est pas grande, 10 kilomètres de long par 2,500 kilomètres de large. La seule route était en ciment et très sinueuse voir dangereuse par son étroitesse. La plupart du temps l'un des deux véhicules devait se garer contre la montagne pour laisser passer l'autre. Coté mer par moments la coupure était impressionnante et abrupte. Sur plusieurs dizaines de mètres en contre-bas les vagues venaient se briser contre les rochers formant une vaste étendue d'écume. A l'horizon, par temps clair, on peut apercevoir l'île de Saint-Martin. En quelques heures, j'ai fait le tour de ma nouvelle circonscription et la connaissance de nombreux notables de Saint-Barthélemy. 
La population en majorité blanche, d'origine métropolitaine avait " atterrie " dans l'Ile après la révolution française de 1789. Ils avaient fui la France pour ne pas être emprisonnés ou guillotinés.
Les habitants du quartier de Corossol ont gardé les coutumes ancestrales et nous pouvions voir les femmes porter des coiffes Normandes.
A l'origine il y avait quelques familles arrivées dans l'île. Les familles MAGRAS, GREAU, FLORVILLE, LEDEE, LAPLACE.
Elles s'installèrent aux quatre coins de l'île et les enfants se mariaient qui un jeune Magras avec une fille Gréau, un fils Gréau avec un fils Laplace une fille Magras avec un fils Florville. Finalement ils formerent aux files des années une grande famille. Les progénitures en firent de même jusqu'à nos jours. Il ne fallait pas leur dire qu'ils étaient famille. Puisqu'ils épousaient un partenaire du même nom mais résident à l'autre bout de l'île. Alors on assistait à des situations étonnantes où le marié Gréau épousait une fille Laplace, témoins un Laplace et un Gréau ou inversement.

L'ensemble de la population était gentil, serviable et honnête. Nous n'avions à relever aucune infraction pour vole, violence ou autres délits ou contraventions graves. 
Le problème restait l'alcoolisme en raison du prix du rhum brut à 50 cent de cette époque pour un litre.
Me trouvant de service à la brigade, je vois par la fenêtre passer en courant le docteur Hourtiguet, poursuivi à une dizaine de mettre par un Saint-Barth brandir un sabre. Le saint-barth en état de delirium-tremens était arrêté par des passants. Il était équipé d'une camisole de force et transporté par avion, le piper du Maire, sur l'hôpital de Pointe-à-Pitre, accompagnés d'une infirmière et moi en tant que gendarme.
Le mois de mars était propice à ce genre d'évènement nous expliquait le docteur. 
Gustavia avait une Histoire tout comme l'Ile. Il me semble qu'elle a été découverte par Christophe COLOMB, vers 1493 et lui donna le nom de son frère qui s'appelait Barthélemy. En 1648 les Anglais la conquirent, et la perdirent puis reprise par les Français qui la vendirent en 1784 à Gustave III, roi de Suède et c'est ainsi qu'il baptisa la capitale " Gustavia ".
L'Histoire disait que la presqu'île de Gustavia avait été ravagée par un incendie. L'or que ses habitants cachaient chez eux, fondu par la chaleur, coulait dans les rues.
La France rachète l'Ile en 1878 et la rattache à la Guadeloupe en 1946 avec le statut de port franc.

Toutes les petites baies ont une plage de sable blanc et fin qui colle à la peau. Les quartiers sont au bord de la mer. J'ai pu visiter la plupart d'entre eux et rencontrer des gens très gentils, serviables et travailleurs.

Il y avait le quartier de St. Jean, Colombier, Corossol, Les Salines, Lorient et j'en oubli certainement bien d'autres aussi beaux les uns que les autres.

Un inconvénient majeur, il pleut rarement et il n'y a pas de source.. L'eau est devenue un produit rare donc cher. Chacun a, dans ses fondations, un bassin de récupération de l'eau de pluie. Les plus démunis doivent s'ils veulent survivre, acheter l'eau à ceux qui ont des réserves. 

Il fait 22 à 30 degrés toute l'année. Les seuls loisirs restent la pêche, la plage et quelquefois une séance de cinéma par mois.

Saint-Barthélemy est entourée outre de l'Ile de Saint-Martin, d'îles anglophones telles que Saint-Kits, Les Barbades, Saint-Domingue, et j'en oublie. La contre-bande était la principale ressource de ces îles. 
La nuit je pouvais voir des sloops s'amarrer au quai pour charger des fût de rhum et des cartons de whisky de toutes marques vendus détaxés et à des prix défiant toutes concurrences faisant le bonheur des commerçants. Il y a quelque années encore, ces marchandises étaient payées en pièces d'or comme me le racontait le père Bill.

S'il n'y avait pas de cons, aurait dit un gendarme, Saint-Barthélemy était le paradis sur terre. Mais voilà le paradis a été de courte durée. 
Le gendarme faisant fonction de chef de brigade élevé au grade de Maréchal des logis chef reçut une affectation quelque part ailleurs. Il fut remplacé par un chef marié accompagné de sa fille 17 ans environ.
Tout était parfait. Son passe-temps était la pétanque. Moi c'était la pêche, la plongée, puis en dernier la pétanque.
Nous n'avions pas grand chose à faire de la journée si ce n'est prendre des contactes avec les gens de l'île, visiter les quartiers et les hôtels.
L'après-midi après la sieste je faisais une partie de pétanque en famille dans un terrain près de la brigade.

De temps en temps, au passage d'un navire de guerre anglais, en tenue blanche, comme je le faisais avec mon collègue muté, le chef et moi nous allons représenter la France à bord, sur invitation du Commandant du bateau. Tout l'équipage sur le pont rendait les honneurs et ensuite un apéritif était servi. De Saint-Barthélemy, il y avait le maire, des conseillers municipaux, pas très nombreux car il y avait une dissension entre eux, les gendarmes et leurs épouses, le docteur, le percepteur, le biologiste, le syndic des gens de mer et quelques-uns dont je ne me souviens pas des noms.
J'ai pu visiter ainsi entre autres, le HMS Decoy, une frégate de la Marine Anglaise, (le 13 Novembre 1964)
des croiseurs de la Marine Française, Le Commandant Rivière, l'Aviso Henry, un des plus grand voilier-école de la Marine Argentine, ARA FGTA. LIBERTAD, le Calypso de Cousteau etc.etc. J'ai eu l'honneur de plonger avec ce grand marin, pour pêcher quelques langoustes dans des coins que l'un de mes amis St.Barth m'avait fait connaître. Je croyais être fort en plongée j'ai du me rendre à l'évidence…car Cousteau bien que plus âgé que moi, disparaissait dans le fond bleu-foncé, sans faire de bulles sur son sillage. Il ressortait 60 mètres plus loin aussi à l'aise que s'il avait plongé à 4 ou 5m. Ah ! Oui je précise, ont plongeaient en apnée.

Le matin, en tant que gendarme, je faisais les corvées de nettoyage de la brigade. Bof ! Elle n'était pas bien grande la brigade.

Une chose curieuse, à coté de la caserne, je me faisais un plaisir avec les enfants d'observer une paire d'Iguanes qui par curiosité se laissaient approcher. Curieux mais aux moindres mouvements brusques ils se lançaient rapidement en deux bonds se mettre à l'abri dans les brousses.

Ceci dit, ça commençait à bien faire. Je me retrouvais planton, remplaçant, et premier à marcher tous les jours y compris le dimanche. Comme dans une brigade d'une dizaine de gendarmes ! La pétanque, j'en avais raz le bol également. Bien, j'attendais 18 heures et, avec ma femme et les deux enfants, nous partons à pied prendre l'air du coté du port. Le problème était que je ne pouvais utiliser la jeep alors que le chef ne se gênait pas de se balader avec sa femme et sa fille.. J'étais obligé, en particulier le dimanche, de rester dans les environs de la brigade. Le curé de Gustavia me prêtait quelques fois sa volkswagen. Les relations n'étaient pas des meilleurs et pourtant nous étions que deux. Jamais avec le responsable précédent j'avais eu à me plaindre
.Bref, lorsque sa femme s'est mise de la partie ce fut la goutte qui a fait déborder le vase. Fille d'adjudant-chef de gendarmerie elle avait vécu toute sa vie dans les casernes. Alors elle conseillait son mari de comment faire pour me mater. Elle ouvrait le courrier, le lisait avant de le remettre à son mari. Une vraie histoire de fous. Un mince plancher en guise de plafond nous séparait de ces phénomènes. Un soir dans le silence de la nuit nous l'avons entendu conseiller son mari d'utiliser les articles du fameux Service Intérieur de la gendarmerie datant de Napoléon. Parles-lui de l'article ?- me souviens plus - etc.etc.
Le matin je l'attendais avec le règlement dans les mains que je lui balançais sur son bureau. L'air plutôt " con " Il restait a me regarder se demandant si c'était du lard ou cochon. 
---" J'ai tout entendu hier soir alors voici le Service Intérieur " si vous voulez nous pouvons en parler " 
Gêné, il me répondait : 
---" Non ! non ! ce n'est pas la peine je crois que ma femme est énervée mais ça va s'arranger ". 
---" Je l'espère car nous sommes que deux et nous pouvons rendre l'utile à l'agréable au lieu de se taper dessus ".
---" Vous êtes, chef, je suis gendarme mais je ne suis pas votre larbin et encore moins celui de votre épouse "

C'était sans compter sur l'opiniâtreté de cette femme qui allait mener un travail en " sous-marin " pour arriver à ses fins.

Le capitaine commandant la compagnie dont notre brigade faisait partie, venait nous rendre visite de temps en temps. Non pas pour effectuer un contrôle mais plutôt pour faire des affaires intéressantes dans les magasins de Gustavia. Il ne faut pas oublier que Saint-Barthélemy est port-franc donc tous les produits sont détaxés. Le capitaine était réceptionné à l'aérodrome, véhiculé partout, conduit par mon chef et parfois accompagné par l'épouse du chef. Evidement l'occasion était trop belle pour ne pas dire appropriée que dans la conversation je ne sois pas mentionné. Certainement pas en terme flatteur.

Je reviens un tantinet en arrière pour narrer le fait suivant. Le même scénario se répétait à chaque arrivée du Capitaine et ou du Sous-préfet. Celui-ci avait une maison louée ou appartenant à l'administration attenante à la brigade. L'épouse du gendarme, celui qui devait partir à mon arrivée, ne trouvait pas mieux d'allait porter les petits déjeuner à ces messieurs au lever du jour. Le fait de ce service allait ou pas contribuer à l'avancement du mari ? La question reste posée pour moi en tous cas.
Ceci étant dit, le petit déjeuner au lit est resté de rigueur. Madame l'épouse du nouveau chef continuait de l'assurer avec empressement et intéressement. 
Le résultat ne se fait pas attendre puisque moins d'un mois plus tard j'étais muté en Guadeloupe. Brigade de Pointe A Pitre Nord. Aucune raison ne m'était donnée, aucune chance de m'expliquer ne m'était offerte. Je n'ai jamais su la raison officielle de mon départ rapide. Il était évident que je venais d'être la victime de la bêtise humaine " coiffée " par une " grosse tête " d'officier pas plus intelligent que la femme du chef.

Entre temps un collègue était affecté à Saint-Barthélemy ce qui me fit doublement plaisir, d'une part je n'allais plus être seul à faire les corvées et d'autre part il était pied-noir comme moi. 
Très pointilleux sur le règlement et le code de la route, il allait s'attirer les foudres du diable en verbalisant la fille du maire. Elle conduisait depuis qu'elle était en âge d'arriver aux commandes de la voiture des parents. Nous fermions les yeux connaissant le caractère de Monsieur le Maire. Ce dernier nous rendait service en nous ravitaillant régulièrement en fruits et légumes qui n'existaient pas sur notre Ile
grâce à ses voyages par avion sur Puerto Rico, 

Une minuscule baraque sise à proximité du port servait d'abattoir à l'unique boucher de l'Ile. Si l'on voulait être servi en viande il fallait être présent et assister au découpage de la bête.
Lorsque je réussissais d'avoir mon bout de viande celle-ci avait des sursauts par endroits dus aux nerfs pas encore morts.
Parfois elle était immangeable tellement elle était raide. Heureusement elle était cuite dans une cocotte minute dont la cuisson se compter par heures.
Nous avions des produits américains : du poulet congelé, du fromage en boite, du beurre et des biscuits. Le reste venait de Martinique et de Guadeloupe.

Le Delgrès, un petit cargo, faisait la liaison entre la Guadeloupe, Saint-Barthélemy et Saint Martin, l'île voisine. Il permettait à de nombreux maraîchers et revendeurs de l'Ile mère de proposer leurs marchandises
qui étaient exposées sur le quai.
Vers les 16heures tous les invendus étaient re-embarqués et le Delgrès quittait le port pour Saint-Martin.

Une fois par mois, nous avons la visite d'un dragueur de mines de la marine nationale basé à Fort-de-France. Il faisait escale et nous livrait de la marchandise commandée en avance par radio en Martinique. 
L'on pouvait se ravitailler en eau potable, gazeuse, viande etc.
Parfois des sloops s'arrimaient au port et vendaient des fruits tropicaux inconnus, des taros, et autres racines des pays chauds.

Nous ne manquions de rien si ce n'est d'un peu de pluie.
Outre ses moyens de ravitaillement, Saint-Barthélemy était doté d'une goélette " l'Ipana " appartenant à Gréau et puis le bateau de la famille CHOISI, bateau à coque en bois taillé plus pour la course que pour le transport de marchandise. Je ne me souviens pas du nom du bateau mais son propriétaire était lui-même le pilote. 
Ces deux navires transportaient entre autres du bétail entre la Guadeloupe, Saint Martin et Saint Barthélemy
.
J'avais partagé mes journées après le travail, entre ma famille, les amis et la pêche au harpon. 
J'avais fait la connaissance d'un St.Barth qui avait un petit bateau propulsé par un 25 chevaux Evenrude hors bord.
J'ai appris avec lui à pêcher les langoustes " au lasso ". Le lasso est tout simplement un bâton de la taille d'un manche à balai auquel on fixait à un bout un nœud coulissant en fil de fer fin. On façonnait une boucle assez large pour passer la queue de la langouste. Une fois bien passée jusqu'à la jointure de la tête, il faut tirer d'un geste brusque en arrière. Le lasso se referme emprisonne la langouste qui comme vous le savez marche en avant mais nage en arrière lorsqu'elle veut se déplacer rapidement.
Il fallait être rapide autrement la proie se mettait à l'abri dans un trou ou dans une faille impossible de la déloger. La plupart du temps il fallait plonger entre 6 à 14mètres de fond. 
L'eau des Caraïbes est absolument claire et tiède. Aussi il est impossible de conserver le poisson piqué sans que celui-ci pourrisse une heure après.
Nous allions pêcher dans un îlot entre Saint-Martin et Saint-barthélemy appartenant à la famille Bill. Il nous est arrivés un jour de devoir rentrer à la rame, le moteur refusant de démarrer. Je ne vous dis pas les ampoules que nous avions aux mains. La barque appartenait à Gréau propriétaire de la goélette IPANA.
Heureusement j'avais pour habitude de prendre toujours un bidon d'eau douce avec moi et je ne montais jamais su un bateau s'il n'y avait pas une paire de rames. Gréau et moi sommes arrivés extenués à la pointe de l'île, propriété de Rockefeller, maire de la Ville de New-York.
Le gérant, un métropolitain, que tout le monde connaissait, nous a remorqués ensuite jusqu'à Gustavia..
Ce fut une mauvaise partie de pêche mais bénéfique pour la santé.
Une autre fois le manque d'expérience a failli me coûter chère.
J'avais capturé une langouste (porcelaine) par 14metres de fond et je la remontais à la surface lorsque à la suite d'un coup de queue je lâchais le bâton. Je me trouvais à mi-chemin de la surface et instinctivement je suis redescendu la récupérer. C'était une erreur à ne pas commettre. Je croyais n'avoir plus d'air pour arriver à la surface. J'ai fermé les yeux et mettant mes deux bras collés au corps je nageais de toutes mes forces vers la surface. Tel un dauphin je sortais la moitie de mon corps hors de l'eau poussant un cri et respirant tout l'air de la planète. La pêche pour moi était terminée ce jour là. 
En dehors du travail, j'emmenais la famille pas loin des quais, au bord du mur en ciment édifié pour protéger la route de l'érosion. Des petites langoustes que nous appelons " des brésiliennes " se tenaient cachées dans le creux à la base du mur. Au crépuscule, elles avaient l'habitude de sortir pour chercher leur nourriture. Toujours équipé d'un lasso mais plus petit, je les capturais et les enfants se faisaient un plaisir de les sortir avec des cris de joie.

Les Saint-Barth étaient et certainement le sont toujours de grands pêcheurs. Leurs moyens de navigation est le doris. Une barque en bois, à fond plat, très étroite, propulsée par un moteur hors-bord. La région était poissonneuse mais il subsistait un " hic ". Ce " hic' était la " gratte ". La Gratte est une maladie qui vous est transmise lorsque vous mangez un poisson toxique. J'ai eu la chance de passer à travers car je suis un grand mangeur de poissons.
Tel n'était pas le cas pour bien de gens de l'île qui, disaient-ils au docteur lorsqu'ils étaient malades et en nasillant : " J'ai pris un ti risque docteur ". Ils prenaient souvent ces petits risques dont certains en sont morts.
Un laboratoire de recherches marines planchait sur le cas des poissons toxiques dans l'île. Le responsable Mr Maurice, me racontait qu'il était possible que cette maladie soit transmise aux poissons par certains coraux. Rien de positif était trouvé pour l'instant. Les plus atteints étaient les poissons à dents qui mangeaient du corail.
Cela compromettait le développement de la pêche et la vente sur le continent. Lorsque je péchais sur le quai il n'était pas étonnant que je sorte une dizaine de gros pagels et " sargues ", que les habitants présents me conseillaient vivement de rejeter à l'eau. Ce que je m'empressais de faire avant qu'ils ne meurent.

Une fois par an des milliers de bernard-l'ermites descendaient de la montagne tout autour de Gustavia pour changer de coquille au bord de la mer. Cela était unique et à voir
.
Un Allemand, la trentaine s'était implanté à Gustavia et avait monté un magasin d'appareils photos, de caméras. Les commerçants locaux voyaient cela d'un mauvais œil.
Puis un jour il ouvrait le Club Nautique de Saint-Barthélemy. Les voiliers de passages avaient désormais un emplacement où ils pouvaient être accueillis.
Les équipages de ces embarcations s'approvisionnaient en rhum brut pour leurs lampes à alcool.

Il paraît que Saint-Barthélemy a bien changé. De nombreux acteurs français ont construit leur résidence secondaire dans ce paradis. Je n'ai plus de contacte depuis bien longtemps mais j'ai eu l'occasion de voir à la télévision des séquences récentes de Gustavia et de son port. 

Avec mon épouse nous rendions quelques fois visiter la famille Bill, 'les vieux ". Le père Bill, un homme de 70 ans, de grande taille, fort, buriné, cheveux blancs, nous racontait qu'il y a quelques années encore il payait ses achats en pièces d'or.
Au cours d'une de ces visites l'épouse aussi âgée que lui, vêtue d'une blouse délavée noire, à la demande du mari revenait tenant à la main une bouteille recouverte de terre encore fraîche. Quatre verres étaient posés sur une vieille table en bois. La mère Bill nettoyait la bouteille de gestes lents et méticuleux et me la passa avec un tire-bouchon aussi vieux que la bouteille. C'était du vin datant de notre année de naissance. Je ne suis pas un expert mais je me souviens que j'avais apprécié cette boisson. 
Avant de les quitter, madame Bill proposait à ma femme plusieurs livres qu'elle s'empressait de les accepter avec promesse de les lui rendre après lecture.
Ils avaient deux garçons. D'une dizaine d'années plus âges que moi. Ils étaient propriétaires d'un cargo faisant le transport de bétail entre les pays Sud Américains, la Guadeloupe et la Martinique. Nous avions lié amitié avec Raymond le plus jeune des deux qui avait une petite-fille née le même jour et la même année que notre fille Michèle. Avant de quitter l'Ile, il faisait cadeau à ma femme un très beau sac à main en crocodile qu'il avait ramené du Nicaragua.
Je quittais donc Saint-Barthélemy après 18 mois de séjours pour regagner la brigade de Pointe-À-Pitre Nord.

Nous voilà embarque dans le même petit avion qui nous avait ramené, piloté par le Maire, direction Saint-Martin où nous devons changer d'avion, un DC3 bis-moteurs à hélices.
Un moment avons l'embarquement, nous voyons une jeep avec deux personnes à bord s'arrêter devant le DC3. L'un des hommes depuis l'arrière de la jeep tente par deux fois d'attacher à une pale de l'hélice une corde assez solide. L'autre bout était accroché à la boule fixée derrière le véhicule. Puis l'ordre est donné au conducteur d'avancer brutalement d'un mètre ou deux en avant. Il ne se passa rien. J'en concluais qu'ils essayaient de lancer le moteur de l'avion. Le manège recommença et au deuxième essai l'hélice se mit à tourner avec fracas et pétarades enfumant tout l'avant de l'appareil.
Les passagers étaient dirigés vers l'échelle donnant accès à l'intérieur de l'avion. Nous n'étions pas rassurés mais il fallait passer par-là.

Nous étions attendus à Pointe-À-Pitre. Nous avons été logés dans un appartement au premier étage à la Caserne du Petit Pérou. Un appartement décent, aéré et spacieux. Le rêve pour nous qui pendant dix-huit mois avons été logés dans un réduit à crabe. Notre bonheur ou plutôt celui de mon épouse et mes enfants allait être de courte durée. 
Une quinzaine de jours après il a fallu déménager à la brigade de Pointe-À-Pitre-sud. Là où nous sommes arrivés la première fois. Un appartement d'une chambre au premier étage nous attendait. Troisième déménagement. Défaire les caisses etc…Le travail était pour ma femme comme d'habitude puisque dès mon arrivée j'étais de service.
Je connais mon travail pas de problème, il me suffisait de suivre le mouvement. Constatations d'accidents, établissement de procès-verbaux, 4 ou 5 exemplaires rédigés avec de vieilles machines à écrire papier carbone ayant déjà servi une dizaine de fois.
Un mois après me voilà muté à la brigade de Pointe-À-Pitre-nord. Nous recommençons de placer nos affaires dans les caisses. Un moment après le camion arrive. Vous croyez que quelqu'un allait nous aider ?????? " Peau de balle " Ma femme et moi nous avons descendu les caisses depuis le premier étage et les avons embarquées dans l'arrière du camion. Un Renault bâché couleur bleu-marine de la gendarmerie mobile. 
Un appartement deux chambres dans un bâtiment récent d'une dizaine d'années, nous était alloué. 
Ma femme et les enfants se plaisaient. Nous avions un balcon avec vue sur le quartier d'en face et un bras de mer qui par la suite fut remblayé pour y construire des habitations à loyers modérés. 
Je suis bombardé motard, et en même temps de service à la brigade. Le bâtiment, de trois étages, avait le rez-de-chaussée occupé par les bureaux de la Compagnie, commandée par le Capitaine Borgio-dit-Borgea, un lieutenant comme adjoint, deux gendarmes au secrétariat et le chauffeur du capitaine. Adjacent, la brigade avec trois bureaux dont un pour l'adjudant commandant la brigade et deux pour un chef et sept gendarmes.
En bout du bâtiment il y avait deux garages, un avec des ordures et l'autre qui servait de lavoir aux familles. Un bus baptisé a cage aux poules "stationnait en permanence. Il assurait le transport des enfants aux écoles et aux familles qui désiraient se rendre au Centre ville pour faire les courses.
Je n'avais pas à me plaindre. Je sortais souvent pour le service. Nous étions 4 gendarmes pour deux motos BMW. Chacun son tour nous faisions les polices de la route, les escortes de fonds et les ouvertures de routes pour les autorités métropolitaines en visite en Guadeloupe. 

Pendant les évènements survenus en 1965/1966, soulèvement d'une partie de la population pour l'indépendance, j'étais désigné pour le transport des plis confidentiels entre le commandement de Pointe-à-pitre et Le Groupement de Gendarmerie de Saint-Claude. Je devais la plus part du temps me faufiler entre les groupes de manifestants à la sortie de la ville particulièrement au Pont de la Gabare un bras de mer qui séparait les deux terres. J'ai eu beaucoup de chance malgré les pierres que l'on me lançait au passage, je réussissais de passer sans être blessé.

La ville de Pointe-À-Pitre avait été mise à sac et à feu. Des vitrines avaient été brisées un peu partout et certains magasins pillés et incendiés. Des avènements qui me mirent en mémoire ma propre vie d'il y avait à peine 5 années.
A la brigade tout se passait bien. Un jour planton, un jour remplaçant, un autre premier à marcher.
Je m'explique : 
Planton, est celui qui reste en service au bureau 24 heures. Il reçoit les visiteurs, les renseigne, recueille les plaintes en tous genres. Derrière le bureau un paravent cache un lit avec un matelas crasseux. C'est sur ce lit que le planton prendra quelques heures de repos si le téléphone le permet.
Si un accident, ou n'importe quelles autres infractions extérieurement sont signalés, le planton réveille le premier à marcher et le remplaçant pour effectuer le ou les constats. Si d'autres faits sont signalés, d'autres gendarmes sont envoyés sur les lieux. L'adjudant n'est en aucun cas dérangé. Mais de toute façon il n'est d'aucune utilité juste d'avoir son nom sur l'entête du procès-verbal que le gendarme va rédiger et transmettre au Procureur de la république. Pour s'attribuer les mérites surtout s'il s'agit d'une enquête pour voles ou autres délits dont les résultats sont assurés.
Le remplaçant, reste toute la journée au bureau rédige les procès-verbaux, et remplace le planton aux heures des repas. Il participe aux enquêtes avec le premier à marcher.
Le premier à marcher, doit prendre à son compte tous les constats et plaintes nécessitant son déplacement à l'extérieur.
Le samedi matin le commandant désigne deux gendarmes pour les corvées de nettoyage autour du bâtiment nettoyages des vitres, ramassage des détritus et tendre le gazon. Une tenue spéciale nous est allouée par le service du casernement, un short et une chemisette couleur de l'Arme. Bleu délavé. 


Le mot avait été passé au personnel de la Compagnie de Pointe-À-Pitre par le capitaine de la Compagnie de Basse-Terre, concernant le motif de ma mutation. Mauvais caractère, désobéissance vis à vis du commandant de brigade et que sais-je quelles conneries encore. Le fait est que l'adjudant me regardait de travers et chaque fois qu'il s'adressait à moi c'était d'un temps plutôt " pet-sec ". 

J'avais connu à Saint-Barthélemy le Procureur de la république du Parquet de Pointe-À-Pitre. Je n'avais pas fait grand chose pour lui juste je lui avais proposé de mettre dans mon frigidaire des produits de première nécessité tels que le beurre, fromage, lait etc. Il logeait dans la résidence du sous-préfet et il n'y avait pas de réfrigérateur. Pendant son séjour, nous avons été pécher au harpon autour de l'île. Je lui avais montré comment plonger, décompresser et traquer les poissons pour les piquer au harpon. 
Il avait apprécié ma présence et il avait quitté l'île avec de bons souvenir me dit-il en partant.

Don Un jour que j'étais planton à la brigade au standard téléphonique, j'ai un appel du Procureur de la république dont je parle plus haut. Il voulait être connecté avec le capitaine. La politesse voulait que le gendarme à ce poste se présente en décrochant. " Ici bla bla bla à l'appareil, que puis-je pour vous ? Bien, je vous passe le capitaine machin ". Puis ce magistrat me demande si c'était bien moi le gendarme de Saint-Barthélemy. Et nous nous mettons à discuter pendant une vingtaine de minutes. La question vient sur les travaux d'O.P.J. (officier de police judiciaire) que je suivais depuis trois ans dans l'intention d'obtenir ce diplôme. La raison évoquée de mon retrait de la liste était que lorsque je fus affecté à Saint-Barthélemy la Compagnie m'obligea de refaire la deuxième année bien que mes notes étaient au-dessus de la moyenne. 
La conversation s'arrête donc sur ce sujet et le plaisir de se revoir pour une partie de pêche.

Ce Magistrat était bien connu pour son caractère austère, peu porté aux rencontres avec les notables de la ville. 

Quelques jours après cette conversation, le gendarme responsable du secrétariat de la compagnie vient me voir avec un message du groupement de Saint-Claude. Ce message disait en l'occurrence que mon inscription était acceptée pour la continuation des mes travaux d'OPJ en deuxième année. Ma réponse fut négative. " Rien à faire et encore moins en deuxième année ". Le gendarme, alors que depuis mon arrivée il m'ignorait en raison de ce que je traînais derrière moi depuis mon départ de l'île, me suppliait d'accepter. " Le commandant me faisait une grande faveur en m'offrant cette opportunité " me dit-il. " puis je n'ai rien demandé ni au commandant ni à personne ".
Le gendarme devait à contre-cœur passer un message au groupement relatant mon refus. Mauvais effet pour eux un refus pareil. Ils savaient bien que j'avais la moyenne dans mes travaux et qu'ils n'avaient en aucun cas le droit de m'obliger à refaire une troisième fois la 2eme année. Quelle histoire je leur causais bon dieu ! Du jamais vu. Bin voyons juste au moment où le gendarme était au tableau d'avancement pour le grade supérieur. Le stress J J'ai eu droit plusieurs fois à sa visite avant qu'il ne se decide de passer ce fameux message.
Vendredi soir je vois le capitaine s'avancer vers moi. Je rédigeais un procès-verbal d'un accident de la circulation. Je me lève et le salut, c'est la règle.
---" Vous connaissez le Procureur de la république ? "
---" Oui je l'ai connu à Saint-Barthélemy sans plus "
---" Vous êtes chanceux. Je ne lui connais aucun ami et il vient de me demander s'il m'était possible de mettre à sa disposition la vedette de la gendarmerie pour une balade et un coup de pêche avec vous ".
---" Je ne sais quoi vous dire capitaine ".
---" Il m'a demandé aussi de lui envoyer toutes vos notes sur les travaux d'OPJ que vous avez fait en deuxième année ".
---" Je ne suis pas au courant. Il m'a demandé pourquoi j'avais arrêté mes travaux. Je lui ai expliqué mes raisons tout simplement. Il a été très surpris. "

Le dimanche matin je partais passer la journée avec le magistrat sur la vedette de la gendarmerie à l'étonnement de mon commandant de brigade et du personnel de la compagnie.
Les choses allaient évoluer et changer. Le commandement du groupement avait changé entre temps. Je devais être convoqué dans la semaine par le nouveau commandant à Saint-Claude. 

---" J'ai la réponse à mon message et vous refuser mon offre ?
---" Oui mon commandant je me suis déjà expliqué à ce sujet. J'ai fait deux années et je n'ai pas envie de faire une troisième alors que j'ai la moyenne ".
---" Oui j'ai là vos notes et le Procureur de la république de Pointe-À-Pitre me demande les raisons qui ont fait que vous avez été pour la troisième fois inscrit en deuxième année ".
---" Je ne sais pas ce qui s'est passé mais je vous inscris sur la liste des troisièmes années et vous avez intérêt de réussir votre examen. Dans le cas contraire je vous botterai le cul. "
---" Bien mon commandant, on verra "

L'entretien était terminé. Je regagnais la brigade pas tout à fait heureux de devoir me remettre au travail pour quelques mois car l'examen de fin d'études devait avoir lieu sous peu.
J'obtenais sans difficulté mon diplôme à l'issue de l'examen.

Le chef X… commandant la brigade de Saint-Barthélemy était muté à son tour au Groupement de Saint-Claude. Je devais le rencontrer avec son épouse, sa fille et l'ami de sa fille, sur la plage de Saint-François.
Bien entendu nous avons été surpris mais j'ai préféré l'ignorer.

Quelque temps après tout le personnel du groupement devait se rendre à l'évidence et s'apercevoir de la réelle personnalité de ce chef et de sa famille. Petit à petit la vérité se fait jour mais entre temps je devais payer de ma personne l'étiquette qui m'avait été collée par ce triste personnage et le capitaine qui l'avait écouté sans chercher à comprendre. 

La bêtise humaine dans la gendarmerie n'a pas de limite.

Excepté les gendarmes de service, les autres en principe ont quartier libre le samedi et le dimanche. Cela est très rare mais il fallait l'accepter.
Samedi soir je suis donc libre et je promets à ma petite famille de les emmener au cinéma. La ville était à portée de ma vieille deux chevaux.
Dans l'après midi le nouveau commandant de brigade ancien de la brigade de Le Moule, passé adjudant, nous rassemble et nous dit :
---" ce soir personne ne sort. Je suis invité par le maire de Le Moule et vous devez rester tous présent à la brigade. " 
---" Mon adjudant je ne suis pas de service ce soir. J'ai promis à ma famille de les conduire au cinéma. Ça fait un mois que je n'ai pas pu les sortir. "
---" Pas question vous restez là, avec les autres. Le chef Eramouspet mon adjoint me remplacera un point c'est tout "
Un ordre est un ordre.
Avant la fin de la soirée le lieutenant adjoint au capitaine passe devant le bureau. Je l'appelle et je lui dit :
---" Vous m'aviez dit un jour que si j'avais des questions à poser ou des problèmes, de vous le dire. Voilà je n'aime pas les injustices et vous le savez ; Je ne suis pas de service et je n'ai pas eu un samedi ou un dimanche depuis des mois. Or aujourd'hui je profite de cette occasion pour sortir avec ma famille et l'adjudant, invité pour un méchoui par son ami le maire de Le Moule, nous interdit de sortir. " 

Dans la soirée le capitaine traverse la cour en direction de sa voiture. L'adjudant semble l'attendre devant son bureau. En effet, il s'avance vers le capitaine et raide comme un bâton il le salut claque des talons et lui dit :
---" Je suis invité ce soir par le maire de Le Moule.
---" Je le sais. Bien, ceux qui sont de service resteront à la brigade les autres ont quartier libre. Compris ?
---" OUI mon Capitaine. A vos ordres mon Capitaine ! " .

Furieux l'adjudant vient nous voir et rageur il demande qui a parlé au capitaine ? Personne n'a parlé au capitaine. Effectivement je n'avais parlé qu'au lieutenant. Encore une affaire qui était réglée par la " bande. "
Bref des anecdotes comme celles-ci, j'en ai eu souvent à faire face.

Par exemple un gendarme arrive de métropole. C'est un pied-noir comme moi. Donc je suis content. Mais voilà que ce gendarme me dit avoir été pistonné par le colonel de Brosse le fameux commandant des barbouzes d'Alger. Et responsable de la caserne des Tagarins, renommée pour les tortures qui s'y faisaient contre les Pro-Algérie Françaises dont plusieurs milliers ont disparus sans que de Gaulle s'en inquiète le moindre du monde. Hou là, pas bon signe pour moi ça. L 
Je suis muté à la brigade de Pointe-À-Pitre sud pour laisser ma place au nouvel arrivant.

Quoiiiiiii ! Il paraît qu'il vient d'une brigade de motocyclistes et il est apte pour ce service. Donc comme par hasard c'est moi qui ai été choisi pour lui laisser la place.

Pas question de me laisser faire contre cette nouvelle injustice. Je refuse, et je m'enferme dans mon appartement en prévenant que je ne bougerai pas et de ne m'envoyer personne parce que j'ai mon fusil et les cartouches pour me défendre. 
La goutte avait fait déborder le vase de toutes les injustices dont j'avais fait l'objet depuis mon arrivée sur la Grande-Terre. Et fatigué du nombre de déménagements que j'avais du subir en quelques mois.
L'affaire a fait grand bruit et fut vite réglée sans suite à mon encontre. Je restais à la brigade et mon compatriote fut simplement ajouté à l'effectif de la brigade.

Un soir pris de douleurs sur le coté, je rentrais à l'hôpital de la ville pour une opération de l'appendicite.
Mon séjour se terminait entre temps. Je n'acceptais pas ma semaine de convalescence et je prenais le bateau pour la métropole la semaine d'après. Pendant la traversée je fus soigné par le docteur du bord. Oufffffffff.
Bonne traversée de quinze jours. Escales à l'Ile de Madère, Vigo, Southampton, Le Havre.
Une traversée inoubliable. Les enfants et nous-mêmes nous nous sommes donnés à cœur joie.
J'arrivais pratiquement guéri et près à passer de bonnes vacances. 
Six Mois de congés payés. De quoi oublier mes mauvais moments.

A suivre  --  Nouvelle-Caledonie

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